Les Croix Quarantaises - Croix des Chemins en pays d`Hérault

January 31, 2018 | Author: Anonymous | Category: N/A
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on dit, "….que de cette montagne on voit Quarante et deux villes."

Jacques COUPAT

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Table des matières N° de paragraphe.

N° de page.

- Page de garde 1 - Table des matières 2à3 - Préface. 4 - Les croix. 5 1- Définitions. 5 2- Filiation des croix. . 6 3- La croix et l’Occitanie. 12 4- La croix Latine ou Crucifix. 13 5- Tableau de filiation des croix. 16 6- Bibliographie. 17 7- Les Croix quarantaises. 18 à 19 8- Carte de repérage des croix de Quarante. 20 9- Nomenclature des croix du territoire quarantais. 21 Les croix, première partie. 22 à 32 Les coquilles et au sujet du buste reliquaire de St J.Baptiste. 32 à 33 Les croix, deuxième partie. 34 à 51 Annexe. Photo de Saint -Jean- Baptiste. 52 A QUARANTE. 53 1 - L’histoire de St J. Baptiste dans le village deQuarante. 53 2 - Condamnation de St J. B. par Hérode. 53 3 - Le culte populaire de St J.B. 54 à 55 4 - J. Baptiste patron de la paroisse et de la foire du 29 août. 55 à 57 5 - Quels sont les documents qui confirment l’existence du 57 à 58 culte de St-Jean- Baptiste en territoire quarantais? 6- Mais de quelle chapelle était-il question dans ce rapport 58 à 59 de 1404? 7- Croix de Juillet. 60 à 61 a- Emplacement de la croix de Juillet. 61 à 62 b- Ses appellations. 62 à 63 c- Situation géographique de cette croix. 63 d- Les ex-voto. Leurs aspects. Ce qu’ils sembles représenter. 63 à 64 e- Diversité des ex-voto de la croix de Juillet. 64 f- Datation de cette stèle. 64à 65 g- Analogie des croix ex-voto de " Juillet " avec d’autres 65 croix ex-voto. h- Tableau de comparaison des croix d’Aigues-Mortes 66 à 67 avec celles de la stèle de Quarante. - Stèle de la croix de juillet ,photo. 68 8 - Cette stèle aux ex-voto marquerait-elle l’emplacement d’une 69 Bataille? 9 - Les croix en tête de fût de la stèle dite de "Juillet." 70 à 71 .

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N° de paragraphe .

10- La Rose-Croix Occitane Nestorienne - La Rose-Croix de Quarante. 11- Quels sont ces hommes à l’origine des croix gravées sur cette stèle? 12- Analyse . .

CONCLUSION.

N° de page. 71 à 73 73 74 75

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Préface Comment identifier une croix, autrement qu’en imaginant quatre éléments rectilignes, en contact par l’une de leurs extrémités, formant des angles à leur rencontre . Il n’est pas plus bel exemple de cette application que celui qui nous est donné par " mère " nature, depuis la formation des roches, constaté dans les pierres de Coadry, dans le Finistère-sud, par exemple. En effet, les minéraux, appelés staurotides ou pierre de croix par leurs formes qui se trouvent au sein de schistes et de micaschistes, ont la particularité de prendre la forme d’une croix lors de leur cristallisation. (Document ci-contre). Ces éléments croisés ne sont d’aucune manière rattachés à un symbole divin, tout au plus le sont-ils à celui de leur composition chimique. Et pourtant, dès l’apparition de l’homme, il les a tenu pour des amulettes et talismans. Puis, avant l’établissement du christianisme, la croix était le gibet des infâmes et des esclaves. Lorsque Platon veut peindre le juste par excellence, victime de la plus cruelle injustice, au milieu des plus affreux supplices, il le représente crucifié. C’est donc avec raison que Saint-Jean-Chrysostome disait : " que le nom seul de la croix était un châtiment ".Mais voilà que ce bois d’ignominie devient l’objet du respect "universel." Désormais, toutes les grandeurs s’abaissent en sa présence. Devant la croix s’évanouissent les ombres de la superstition, tous les vains systèmes de la philosophie. Elle dégage l’homme de la matière, elle l’affranchit du Joug des sens, elle lui fait concevoir une profonde abnégation de lui-même, elle lui inspire un dévouement sans bornes pour ses semblables; elle fait des hommes riches, si orgueilleux, si égoïstes, si méchants et si durs chez les païens,…. les serviteurs de leurs serviteurs. Sa vue seule est un éloquent discours; elle réprime la cupidité et l’avarice, ces vices monstrueux qui souillaient les sociétés païennes et fait naître et entretient, parmi les grands et riches de la terre, une sainte et admirable émulation pour adoucir les infirmités de leurs semblables et calmer leurs douleurs. Voyez avec quel zèle ils visitent les prisonniers, ils portent des remèdes et des consolations aux malades et distribuent aux pauvres d’abondantes aumônes ! En Orient, en Europe, les déserts et les monastères se peuplent d’hommes et de femmes qui méprisent tous les biens du monde pour vivre la voie étroite et pénible de la croix.

Ce n’est pas seulement depuis un siècle, mais depuis tous les siècles, depuis le grand sacrifice du calvaire, que la croix est un objet d’hommage et de vénération pour les peuples. Les rois en ont fait l’ornement de leur couronne, les armées l’ont prise pour étendard. Elle enflamme le courage des guerriers et décore leur poitrine; elle est le trophée des grands et des petits, des riches et des pauvres. Une croix marque un lieu. Les villes l’ont placée sur les monuments les plus élevés, on l’a plantée sur les chemins, dans les places publiques, sur les limites des communes et les héritages des particuliers. Elle sert de décoration dans les palais des grands, dans la cabane des pauvres etc... Tous voient dans la croix un glorieux symbole de victoire, d’Amour, de Paix et de Liberté . (Extrait de l’encyclopédie catholique de 1846 tome -9-page 739 de Mr l’abbé GLAIRE et LE V te. WALSH et d’un comité d’Orthodoxie).

Ed. Parent DESBARRES .

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Les croix 1-Définitions. Antiquité -Instrument

de supplice, composé de deux pièces de bois, croisées sur lequel se fixaient certains condamnés à mort. (Définition Larousse). Piété -Emplacement de torture, de souffrance, de mort, matérialisé pour les chrétiens et les orthodoxes, par un objet, un signe, un ornement, composé de deux éléments qui se croisent.

Divers -Eléments

de pierre en forme de croix latine, aperçues fréquemment à demi-enfouies sur le bord des fossés, qui indiquent les anciennes délimitations de propriétés particulières ou communales. L’usage d’élever des croix dans les carrefours, à l’entrée des villes et villages, était fort répandu dès les premiers temps du Moyen-Âge, écrit Mr. Viollet-le-Duc, mais de ces croix, il n’en existe aucune qui soit antérieure au XIIème S. Celles des carrefours sont habituellement sur un socle formant un petit autel avec quelques marches en avant. La plupart de ces croix de chemin furent élevées pour conserver le souvenir d’un fait mémorable ou en signe d’expiation. Bon nombre de ces petits monuments ont malheureusement été détruits pendant les guerres de religion ou à la fin du 18ème S. Elles se sont développées depuis le Moyen-Âge (XVIème S.) et sont destinées généralement à christianiser un lieu en symbolisant un acte de foi d’une communauté. Parmi celles de Quarante, deux ont été dégradées, semble t-il : - L’une, le 19 Février 1742, à la porte haute du village, que l’on pense être celle du porche St. Michel. La mention est portée aux archives de la commune sous ces termes : " En oubliant tout devoir de religion, s’éloignant de Dieu et se jetant selon toute apparence au démon, certains s’en prirent à une croix se trouvant à la porte haute ". Le texte poursuit : " Cette croix, bâtie de grosses pierres, la pierre de dessus étant de mâture avec croisillon de fer." -L’autre , serait la croix de " Juillet "dont le fût , selon toute probabilité, a été décapitée de sa croix en pierre calcaire délicatement sculptée en forme de rose-croix occitane et jetée à terre en morceaux. Un seul débris fut retrouvé mêlé aux pierres du talus voisin, à quelques mètres de la stèle. Aucune date de cette détérioration n’est avancée par manque de précision sur cette dégradation. L’occupation antique, des territoires biterrois et narbonnais, plus particulièrement ceux de Cruzy et Quarante, est connue par les travaux de Monique Clavel et Michel Gayraud. " Il est supposé, que certains domaines actuels se superposent à des villas de l’époque gallo-romaine et d’y trouver des croix limitrophes. Les origines antiques de la plupart des " campagnes " sont nombreuses à avoir livré des vestiges gallo-romains. Il semble que beaucoup d’entre-elles ne soient que le souvenir et la survivance d’une villa gallo-romaine", écrivent-ils et de poursuivre "Certains sites habités gallo-romains ont pu arriver jusqu’à nous par la filiation suivante : villa gallo-romaine, village, paroisse, hameau proche d’une église paroissiale ruinée, domaine " avance Mr Pouget. Le grand domaine vit désormais en économie fermée autour de la villa du maître.

6 Ainsi naquit le futur village, autour ou à proximité duquel, se trouvaient les terres formant un domaine, à l’exemple de notre village de Quarante. Ces domaines possédaient une chapelle ou une église, à coté de la résidence du propriétaire qu’entouraient les habitations des cultivateurs constituant un véritable hameau. A Quarante l’exemple nous est fourni par le domaine de Comérac, aujourd’hui ruiné, dont on ne voit plus que les restes du château avec sa chapelle wisigothique, puis le castrum de Saliès dont il ne reste que la chapelle restaurée. L’Eglise et les ordres monastiques étaient très riches. Ils possédaient également un grand nombre de terres jusqu'à la veille de la Révolution. Le constat écrit nous est fourni par les grandes possessions ou biens, quelconques, des Augustins de Quarante, énumérés dans une bulle du pape Innocent IV du 6 des Ides de Mai 1249. Dans le proche environnement de la commune de Quarante, citons deux grands domaines actuels, vendus comme biens nationaux, les Granges du Terral et sa métairie possédèrent leur chapelle et appartinrent à l’abbaye de Fontfroide. Ils furent achetés en Mai 1791 par Barthélemy Andoque et le domaine de Preissan, de l’ordre de Malte, fut vendu avec sa chapelle à un négociant de Carcassonne: Mr Pech Palajanel le 3 Mai 1793. Plus proche de Quarante, d’autres domaines eurent leur chapelle : celui du hameau de Sériège, cité dès 1045, celui de Saint Frichoux, ruiné et déjà cité, celui de Saliés avec la chapelle de St Barthélémy et celui de Comérac ou il ne reste que la chapelle ruinée wisigothique partiellement restaurée, le seul domaine à ne plus posséder une croix dans son proche environnement.

Ci -dessus le château et la chapelle de St Martin.( Comérac)

2-Filiation des croix. Ne remontons pas jusqu’à la préhistoire. " Suivons simplement deux Traditions bien antérieures à l’ère du christianisme ", indique Mr. Bertrand de LA FARGE. - L’une Egyptienne avec la croix de Tau (1) l’Ankh, ou croix ansée, qui pour le culte d’Osiris fera la jonction avec le christianisme, en particulier, dans l’église Copte d’Alexandrie. - L’autre tradition vient des brumes septentrionales scandinaves : ce sont les Runes - Gebo (4a) et Olgiz (4b) qui, assorties du symbole (5) d’Odin, l’inventeur des Runes dans le Panthéon germanique, aboutiront dans le monde celtique à la croix

7 d’ Abellio (2), dans le pays que les celtibères appelleront " Les champs Elysées " qui plus tard deviendront la Septimanie.

1 4a 4b 5 28 2 D’ailleurs, à la même époque, trois siècles avant Jésus-Christ, dans cette province qui deviendra la Septimanie d’un lieu appelé " Oppidum d’ Ensérune," un artiste celte a réalisé une jolie mosaïque représentant une croix annonciatrice, par sa forme, de celle qui intéressera cette province : la croix - Occitane (3). Il est troublant de constater que c’est une croix tréflée à quatre branches égales, à peu près similaire à l’une des croix chrétiennes qui vont apparaître, dans le midi gallo-romain, plusieurs siècles plus tard.

.

3 24 L’ère chrétienne commence. Les chrétiens utilisent un nombre très limité de symboles : L’Agneau parce que le Christ est qualifié d’agneau dans l’Apocalypse de Jean, par allusion allégorique à l’agneau d’Abraham. Il y a ensuite le Poisson, parce qu’il est le symbole des hommes que les apôtres ont pour mission de pêcher et parce qu’il y a le fameux jeu de mot grec " Christ-Sauveur " = Ichtys = Poisson. Les Cathares qui nous intéressent particulièrement ici, parce que leur sort, en Occitanie, fut étroitement lié à celui des porteurs de la croix occitane (24) en particulier, les Comtes de Toulouse leurs défenseurs, ont abondamment utilisé le symbole du poisson pour représenter le Christ comme en atteste le nouveau testament Cathare de Lyon. Il y a enfin le Chrisme (9) l’ Anagramme du Christ. Il est constitué par les lettres grecques Khi - X - et Rho - P - qui, superposées, veulent dire " Christos ".

9 10 11 Rapidement, le Chrisme est stylisé de manière très dépouillé, (10) parfois agrémenté des lettres grecques ALPHA - Α et OMEGA - ω, en référence à la parole prononcée par le Christ dans l’Apocalypse de Jean " Je suis l’Alpha et l’Oméga, le commencement

8 et la fin." Donc un Chrisme agrémenté de l’Alpha / Oméga (11) évoque, avec une extrême insistance le Christ aussi appelé : " Chrisme en croix Cosmique ." Ce chrisme va être ensuite sollicité pour exprimer une notion supplémentaire : celle de Dieu. Nous savons que dans la théologie chrétienne, Dieu l’Unique, est composé de trois entités, qui allégoriquement, sont appelées : le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Il est coutumier de représenter ce Dieu unique et ses trois entités sous la forme d’un triangle équilatéral dont chacun des côtés représente l’une des composantes de la Trinité divine. Certains chrismes (12) sont agrémentés d’un ou plusieurs triangles comme cela apparaît sur une stèle à Belpech en Lauragais Audois, puis sur la croix de Couquette à Quarante, ou encore, dans la partie supérieure de la verrière centrale du chœur de la cathédrale de Narbonne dans laquelle figure le Christ en croix centré dans un triangle équilatéral bleuté.( voir figures ci-dessous). Cette croix de Couquette, latine aux bras évasés, porte la date de 1589 mal perçue par la dégradation de la gravure. Monolithe en pierre calcaire, elle se trouvait autrefois à la bergerie de Couquette, au bas du versant sud de la garrigue blanche, avant d’être déplacée dans la propriété de J. Chappert à Quarantette. Elle présente, sur la branche supérieure verticale, un triangle équilatéral inversé dont le sommet orienté vers le bas suspend une petite croix latine en saillie. Ce triangle est un symbole Trinitaire. Le Chrisme se dépouille progressivement et se réduit à la lettre Khi-X - (13). C’est l’époque où l’apôtre André arrive à Nicée dans la région de Byzance qu’il évangélise. Son emblème est justement ce seul Khi- X. Il deviendra la croix de Saint-André.

Croix de Couquette cliché. J. Coupat 12

Arles . Croix sur tombe

13 Cathédrale de Narbonne. Cliché J. Coupat

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9

14 18 19 Le Khi- du chrisme, utilisé seul et remis dans l’axe vertical, va devenir la croix Grecque (14) aux traits plus ou moins épais ou accentués aux extrémités par des pattes, ce sera la croix Patté (17) qui, mille ans plus tard, sera utilisée par la majorité des croisés, d’où leur nom, et par les Chevaliers Templiers (18) au début du XIIème S. De cette croix, dérivera aussi la croix de Jérusalem et de ses quatre principautés, symbolisées par les quatre petites croix identiques qui l’accompagnent (19). Revenons aux premiers siècles du christianisme, à l’époque où est utilisé, entre autres, le chrisme Trinitaire (12 page précédente), mentionne Mr de La Farge. Ce chrisme va progressivement être utilisé pour signifier toute la Parole évangélique. Les apôtres, comme leur en a donné mission le Christ, annoncent aux quatre coins du monde, que Dieu est Trinité, c'est-à-dire : le Père, le Fils et le Saint Esprit. C’est d’ailleurs cela qui constitue l’origine du Signe de Croix. Ainsi, le chrisme Trinitaire veut-il dire tout cela. Son graphisme va d’abord être simplifié et va devenir la croix des Croisés (15)

Copte 15

16 St Maurice.

16

St Marc.

D

Cette simplicité va devenir plus complexe et conduire à la croix Tréflée (16) qui sera adoptée par Marc l’Evangéliste fondateur de la prestigieuse Eglise d’Antioche : l’Eglise Copte. Cette croix prendra le nom de : croix Copte et de croix de Saint Maurice à la suite du massacre, dans les Alpes, de la légion romaine Thébaïde composée de chrétiens coptes commandés par le général légat copte Maurice. Nous sommes approximativement arrivés au IIIème et IVèmeS. Il n’est toujours pas question de croix Crucifix. C’est à cette époque qu’apparaît un personnage qui va donner plus de lustre au chrisme : l’empereur Constantin 1er. Nous savons que par ce signe, XP, il a vaincu l’ennemi. Constantin 1er fait adopter le chrisme, le Labarum, symbole du Christ partout dans l’empire, maintenant étendu à l’orient, en particulier dans sa nouvelle capitale de Constantinople, l’antique Byzance. (Voir le tableau synoptique en B page 16).Le chrisme et la croix trinitaire tréflée s’y rejoignent et l’église de Constantinople opte pour une nouvelle croix trinitaire dérivée de la croix tréflée, toujours utilisée de nos jours par le grand pontificat de Constantinople (D). Peu de temps après, au sein de cette Eglise, survient un schisme entre le patriarche de Constantinople et l’un de ses évêques orientaux, Nestorius. Les partisans de Nestorius, entament alors un extraordinaire périple vers l’est qui les conduira en Chine et au Japon.

10 Leur immense trajet, par l’Irak, la Perse, la Mongolie, le Tibet, la Chine, sera jalonné, vers les V et VIèmeS, de croix graffiti nestoriennes (23) directement issues de la croix du patriarche de Constantinople ci-contre. 23.

Croix Nestoriennes

Croix graffiti

Byzantine

Actuelle

Au IVèmeS, les Wisigoths et Ostrogoths, antiques adeptes et descendants d’Odin, se convertissent au christianisme sous l’influence de leur premier évêque, Ulfila, qui vient de traduire les Evangiles en langue gothique, au moyen d’un nouvel alphabet dérivé des Runes et du Grec, n’adopte, ni le christianisme du Pape de Rome, ni celui du Patriarche de Constantinople, mais celui d’un dissident : l’évêque Arius, qui avait été déclaré hérétique par le premier concile de Nicée, convoqué autoritairement par l’empereur Constantin. Les Goths vivaient jusqu’alors au nord du Danube. Refoulés par les envahisseurs Huns, ils pénétrèrent dans l’Empire en franchissant le Danube vers la Bulgarie et vers la Grèce avec l’accord de l’Empereur et du patriarche de Constantinople. La condition de l’autorisation d’émigrer, à l’intérieur de l’Empire, fut la conversion des Goths au christianisme. Il n’y eut pas, alors, d’objection à leur adoption au christianisme arien. Toujours est-il que les Wisigoths vont, eux aussi, être familiarisés avec l’usage de la croix Trinitaire du Patriarcat de Constantinople. En 580, lorsque les deux frères et rois Wisigoths Hermenegild et Recared en frapperont leur monnaie et en 711, lorsque le roi Wisigoth Pelayo l’utilisera comme emblème de ralliement et de guerre contre les Maures en Espagne, ce sera en reconnaissance de leur christianisme. Dans le même temps, l’histoire du chrisme trinitaire continue. Nous avons vu que la trinité pouvait être symbolisée par un triangle équilatéral. L’idée apparut alors de transformer chaque branche en un triangle. Ainsi naquit le chrisme TRINITAIRE à branches triangulaires (20). Les triangles ont évolué de l’équilatéral à l’isocèle, comme cela est visible sur les stèles de pierre situées, une en Lauragais (1) l’autre à Quarante (2) dans l’exemple ci-après.

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20. Ouveillan

Lauragais ou lettrine 1

Quarante ou Bosnie 2

Forme du testament

cathare de Lyon H

Par ailleurs, il est intéressant de souligner que: - d’une part, ces croix chrismes trinitaires, se situent toutes deux en pays occitan. - d’autre part, cette même croix chrisme trinitaire figure dans une lettrine (1) du Nouveau Testament cathare occitan de Lyon (H). Beaucoup de symboles se rejoignent. Si les Wisigoths ont montré qu’ils connaissaient la croix tréflée trinitaire de Constantinople, ils utiliseront aussi une deuxième croix chrisme dérivée de la croix triangulaire trinitaire précédente. Par ailleurs, elle est identique à l’une de celles qu’utilisent les chrétiens coptes et annonciatrice de la croix de Malte. La face extérieure, en base du triangle trinitaire, est devenue concave : une rosace occupe le centre et l’alpha-oméga accoste la base de la croix. La concavité est pointée en son centre, indiquant qu’en fait il y a trois points à chaque extrémité. Le dessin définit douze points symbolisant les douze apôtres et une rose centrale symbolisant le Christ (4). Nous verrons plus loin que ce dessin en forme de rose-croix a été accentué en chine par les chrétiens nestoriens.

4

B Malte

De cette deuxième croix Wisigothique, va dériver une croix très stylisée, aux alentours de l’an mil, qui sera utilisée par les navigateurs commerçants de la cité italienne d’Amalfi. La croix d’Amalfi sera reprise peu avant 1100 par les Chevaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem. Cette croix est aujourd’hui devenue, neuf cent ans plus tard, la croix de Malte (B). Cette croix, aux branches égales très évasées qui tient dans un carré, est nommée ainsi parce quelle fut l’insigne des Chevaliers de Malte, héritiers des Hospitaliers de St-Jean-de-Jérusalem. Il ne faut pas la confondre avec : le nimbe crucifère qui auréole parfois la tête du Christ et la croix de consécration qui tient dans un cercle visible, sur les murs et piliers des églises consacrées, comme l’abbatiale de Quarante en particulier, malgré qu’elle soit représentée par d’autres symboles graphiques. Il est, en tout cas, certain que Raimon VI, Chevalier Hospitalier porteur de la croix de Saint-Jean-de-Jérusalem, voulut que sa dernière demeure soit au cœur de la maison de ses frères Chevaliers de Saint-Jean à Toulouse. Il s’y trouve d’ailleurs toujours en compagnie du fondateur de l’ordre des hospitaliers : frère Gérard.

12 De la croix de Malte, vont dériver des variantes ou les émaux et les métaux seront inversés ou changés. C’est le cas de la croix de l’ordre de Saint-Lazare ou encore, pendant la période médiévale de la croisade contre les Albigeois, la croix Ancrée ci-contre, qui montre bien qu’il y a en fait trois points : un concave et deux aigus aux extrémités de chaque branche. Cette croix a, elle aussi, été qualifiée à tort de croix Cathare. Jamais les cathares n’ont arboré ce type de croix. Il est, par contre, intéressant de savoir qu’elle figure sur les armoiries et sur les monnaies de l’antique famille d’Anduze, aujourd’hui dans le Gard, et sur le blason de la famille Montalembert.

3-La Croix et l’Occitanie. " Nous voilà revenus au cœur de ces pays de la Gaule du Sud qui deviendront ce que nous appelons, depuis cinq siècles, l’ Occitanie. Pendant les six premiers siècles après J.C., les principaux emblèmes chrétiens à y avoir été utilisés, furent le chrisme, le poisson, et l’alpha-oméga. " écrit Bertran de La Farge. " Rappelons-nous que les croix à branches égales et cléchées (quand l’extrémité de ses branches s’évase à peu près comme la poignée d’une clef) faisaient déjà partie, à l’époque préchrétienne, des patrimoines culturels et historiques familiers des habitants de ces régions : ce sont les croix celtiques d’Abellio et d’Ensérune. Les croix, de Constantinople et Nestorienne, se sont implantées progressivement en Provence où elles devinrent l’emblème des marquis de Provence et des comtes de Venaissin, de Forcalamier, etc..., avant d’être transmises en dot, par l’une des héritières de la Provence, aux comtes de Toulouse. Cette croix, longtemps (puisque les deux précitées sont similaires) appelée improprement " croix de Toulouse " devint alors réellement et bien historiquement l’emblème de toute cette Occitanie du Sud qui englobe les parties occitanes des trois régions: l’ancienne et romaine, grande province Narbonnaise qui deviendra d’abord Provence, Septimanie et Toulouse, avant d’être aujourd'hui Provence-Alpes-Côte d’Azur, Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées. Aussi, est-il plus juste de la nommer aujourd’hui croix occitane ou Croix d’Occitanie. Elle devait par la suite revêtir les graphismes, les plus divers, depuis les plus grossiers, jusqu’aux plus élaborés (24) et plus près de nous jusqu’à la croix héraldique enhendée n° (25). 24

25

Sarlat :sur mur de défense prés de l’église.

13 En 1053, lors de la deuxième consécration de l’église abbatiale de Quarante Guifred, archevêque de Narbonne, dédicaça un autel en l’honneur de la Sainte croix. Il semble évident qu’il y avait déjà, en ce lieu, une relique de cette dernière. Etait-elle celle, dont parle le curé Louis Vabre, qui fut récupérée par la famille Laforgue lorsque celle-ci quitta Quarante ? (voir paragraphe suivant).

4-La Croix Latine ou Crucifix. Jusqu’à maintenant, nous n’avons pas parlé de la croix Latine ou Crucifix. Tout commença en fait en 326 à Jérusalem, par la découverte ou " l’invention " des trois crucifix de Jésus et des deux larrons, par Sainte Hélène, mère de l’empereur Constantin . Le crucifix qui était supposé être celui de Jésus, fut scindé en trois fractions : l’une restant à Jérusalem, la deuxième envoyée à Byzance et la troisième à Rome. Le premier Crucifix a être publiquement et véritablement utilisé, comme objet de vénération, le fut à Narbonne au VIè, ce qui déboucha au siècle suivant sur la découverte, en pays Gaulois, de la célébration de " l’invention de la croix." La fraction conservée, à Jérusalem dans une châsse d’argent, fut dérobée, récupérée, puis définitivement perdue par le Grand Maître des Templiers Gérard de Ridefort, quand elle tomba entre les mains de Saladin lors de l’imprudente bataille d’Hattin. . Nous ne parlerons pas ici des multiples trafics par lesquels des milliers de reliques, supposées de la vraie croix, furent dispersées à travers le monde, à l’image de celle de Quarante à laquelle le curé Louis Vabre fait allusion dans son carnet: " Coutumes et usages établis dans la paroisse de Quarante le 1er janvier 1889 " et de citer : " La Relique de la vraie croix appartenait à la famille Laforgue. Les héritiers Laforgue ont quitté la paroisse et emporté la relique. Cette relique servait tous les vendredis de Carême, à la bénédiction du chemin de la croix et offerte à la vénération des fidèles immédiatement après. " 6 et 26

-Reliquaire de la vraie croix de Byzance (musée du Louvre).

Toujours est-il, que c’est du Crucifix qu’est née la croix Latine(6) essentiellement à Rome; le reste de la chrétienté utilisant avant tout le chrisme trinitaire. Sur certaines croix latines, on trouve parfois douze petits cercles, répartis sur les quatre branches de la croix, symbolisant les douze apôtres et un cercle central symbolisant Jésus -Christ. Avant le schisme de l’an mil, entre Rome et Constantinople, l’Eglise orientale grecque avait progressivement adopté cette autre signification de la croix et en était venue à adopter une deuxième croix qu’elle utilise encore de nos jours nommée: soit la croix

14 Orthodoxe (6 et 7), soit la croix de Lorraine (7). Les deux barres horizontales symbolisent les deux royaumes: les royautés qui sont sur terre et le royaume du Père qui n’est pas de ce monde. De son coté, le Pape devait adopter la croix Pontificale (8) d’aspect voisine, à trois branches horizontales. Les trois branches horizontales de cette croix signifient que le Pape est à la fois le maître des pasteurs de l’Eglise, le grand prêtre de ses rites et le Grand maître des consciences humaines.

7

8

Le monachisme Irlandais vint d’Egypte. Les continuateurs de Saint Colomban utilisent encore de nos jours une croix issue d’une part, des traditions celtiques propres à l’antique civilisation Gaëlique, d’autre part, représentative de l’interprétation, (suivre le Christ en abandonnant tout et en portant sa croix). C’est la croix Gaëlique (28) que l’on rencontre à travers toute l’Irlande et qui, à l’origine, comme on peut le voir sur les antiques croix de l’île de Man, était une croix à branches égales simplement portée par un stipe (tige) qui rallongeait, vers le bas, la branche verticale la faisant ressembler vaguement à un crucifix, ce qu’elle n’est pas. La forme caractéristique des croix celtiques a pour origine le " khi-rhô ", le monogramme du christ. Le jambage du R (rhô) devient la hampe de la croix, tandis que le X (khi) en remontant , donne la traverse inscrite dans le rond du R.

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Photo d’ Erwarn Gargadennec

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Parmi les croisés des dernières croisades en Palestine, il y eut les Chevaliers Teutoniques qui rallongèrent vers le bas la croix pattée des Templiers dont ils avaient précédemment adopté la règle et la croix. Ainsi naquit la croix Teutonique (29) comprise entre le Chrisme des Templiers (18) et concession au Pape : Le Crucifix.

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29

Ci-après, autel portatif au motif particulièrement symbolique de la découverte et vénération de la croix latine. Sur la photo on remarque que la croix est entourée: - à gauche, par Saint Sigismond et par Sainte Adélaïde (impératrice du St Empire de 931, morte à Seltz en Alsace le 16 Décembre 999). - à droite, par Constantin et sa mère Hélène qui découvrit les trois croix latines de la crucifixion du Christ et des deux larrons. Richement décoré, il appartenait à la Comtesse Gertrude en 1045.

(Extrait de : Histoire des saints et de la sainteté chrétienne .Ed. Hachette p.74 – tom 5).

16

5 -Tableau synoptique de la filiation des croix.. ( De Bertran de La FARGE ).

-Tableau synoptique de l’ensemble des croix.

-Tableau de comparaison de certaines croix.

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6- Bibliographie. -BRISSAUD Simone, "L’iconographie de la croix et de symboles religieux en Languedoc" Bull. Arch. de l’Aude 1959. -H.G.L., Privat 1827 Bibl. locale. Béziers. -ROLLAN Henri, " L’origine provençale de la croix de Toulouse. " Provence historique." -DAUVILLIER Jean, " Les croix triomphales de l’ancienne église chaldéenne." Société Arch. du midi de la France. -SOLOVIEV Vladimir, " Le symbolisme des monuments funéraires bogomiles." Etudes cathares. -DUCUP Carl, " La croix occitane cathare. " Etude cathares. -HISTORIA, "Les Cathares – La croisade contre le Languedoc ." No. 373 bis 1977. -ROUX Julie – BRENON Anne, " Les Cathares." Collection In Situ. -AUBARBIER J.L. – BINET Michel, " Le pays Cathare." Ed. Ouest France. 129-132. -L’ART BYZANTIN, Bibl. Municipale de Béziers. US 709021 C.O.C. -LAROUSSE encyclopédie, Bibl. de Béziers. p. 578 – 581. -HACHETTE, " L’histoire des Saints et de la sainteté Chrétienne." livre n° 1. -WOOD Juliette, " Les celtes, peuples et culture ." p. 118. -COUPAT Jacques, Photos et rédaction du texte. -Institut Géographique nationale. Carte 2545-O. -MORTIER Raoul, " Dictionnaire encyclopédique QUILLET 1952." -LEVY A., " Ed. Privat Dictionnaire des Pyrénées." -De LA FARGE Bertran, " La croix occitane ". Edition Loubâtière. -TERVARENT Guy, " Attributs et symboles dans l’art profane." -Monique CLAVEL " Thèse, sur Béziers 1970 " et Michel GAYRAUD, sur " Narbonne 1981." -Université Paul Valéry Montpellier- Groupe de recherches en géographie-" Châteaux de la vigne en Biterrois et Narbonnais. Recherche N°4-1989." -VABRE Louis "Sainte Marie de Quarante. " 10 janvier 1907.

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7- Les croix quarantaises. Les pages suivantes font découvrir les croix des chemins et de bâtis du territoire quarantais. Comme emblème cultuel et culturel, ces croix sont aussi présentes dans et autour de l’abbatiale Sainte-Marie. Il faut y voir, là, une œuvre autant archéologique et architecturale que religieuse, ce qui corrobore avec le but de cette recherche. Pour les croyants, la croix a le pouvoir d’émouvoir et d’un profond respect. Les siècles passés sont là pour nous le rappeler. Brandies, elles généraient courage et détermination dans la survie de l’homme, mais parfois devenaient aussi l’objet de précipitation dans la mort d’hérétiques ou de martyrs, par exemple. Bien qu’il y ait eu au Moyen-Âge les fourches patibulaires à Quarante, les croix érigées sur son sol actuel ne sont pas les conséquences de celles-ci. La présence de la croix symbolise tour à tour : un lieu de culte, la mort, un lieu de passage, un lieu de repos (étape), un carrefour, une sépulture, l’emplacement d’un lieu de culte ruiné, celui de rogations, etc., mais, ne nous n’y trompons pas, la croix n’a pas toujours signifiée christianisme. Ainsi Mr. de Mortillet, qui trouva ses preuves dans grand nombre de pays, écrit : "Il ne peut y avoir de doute sur l’emploi de la croix comme signe religieux bien avant le christianisme. Le culte de la croix répandu en Gaule, avant la conquête, existait déjà à l’époque du bronze, plus de mille ans avant J.C. Ce culte, poursuit-il, eut un grand développement avant la venue du Christ et semble toujours coïncider avec l’absence d’idoles et même de toute représentation d’objet vivant. Elles deviennent plus rares et finissent par disparaître dès que ces objets idolâtrés reviennent. La croix a donc été, dans la haute antiquité, l’emblème sacré d’une secte religieuse qui repoussait l’idolâtrie ". Mais à Quarante, les croix qui y sont dressées n’appartiennent pas à cette génération. Il semble que parmi celles qui sont datées, l’une d’entre-elles porte le nom de croix de Couquette gravée de la date de 1589, ce qui en fait déjà un monument historique, l’autre, la stèle de la croix de " Juillette," sans être gravée d’une date, semble pourtant plus ancienne. Par la situation particulière qu’elle occupe et sa conception. Dressée sur un fut romain ou gaulois cylindrique tronqué largement gravé d’ex-voto, elle reçut tardivement une rose-croix et paraît d’une date antérieure au 13èmeS. Il ne faut pas confondre le nom de cette croix avec une autre croix de même nom, crée par la loi du 13 décembre 1830, qui institua une décoration pour perpétuer le souvenir de la révolution de 1830 et pour accorder un signe de distinction aux citoyens qui s’étaient signalés dans les journées du 27, 28 et 29 juillet de cette année là. Par ailleurs, le nom " Juillet " de cette stèle, pourrait bien provenir d’un autre nom " Juillet " en rapport avec les chevaliers, dont nous reparlerons (en page 45 et annexe page 63 f° d ). Les croix les plus anciennes du territoire de Quarante, sont sans aucun doute, celles de l’église abbatiale datées de 983 et 1053 (consécrations). Parmi les autres croix rencontrées ici, certaines sont le fruit d’un travail remarquable et sont érigées en particulier sur les chemins. La plupart furent élevées pour conserver le souvenir d’un fait mémorable, d’une procession religieuse ou en signe d’expiation. Détruites pendant les guerres de religion, la révolution ou à l’occasion d’autres événements, elles ont été relevées et remplacées par de simples croix en barreaux d’acier sans caractère artistique pour la majorité d’entre -elles et font depuis peut la recette des chasseurs de ferraille.

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Monsieur Violet-le-Duc a écrit: "Placées sur un édifice religieux, elles étaient, pendant l’époque carolingienne un décor : incrustées dans les tympans, (comme dans celui du narthex de l’abbatiale de Quarante), les pignons d’églises, les faces des contreforts ou les piliers. Dès le XI ème Siècle, elles furent érigées sur le sommet même des pignons. Pendant le Moyen-âge, écrit –il, elles seront posées, en acier, au sommet des clochers de bois ou des pyramides de pierre qui terminaient les tours des édifices religieux. Les croix étaient surmontées d’un coq ou d’une simple girouette et souvent renversées par la foudre ou détruites par le temps. La plupart étaient d’un riche dessin et leur embase se composait, ou d’une boule, ou d’une bague figurant souvent un dragon, symbole du démon. Des reliques étaient habituellement renfermées dans la boule qui servait de support au coq ou à la girouette ." "Dans l’édifice religieux elles peuvent être des croix de consécration, comme dans l’abbatiale de Quarante, gravées et peintes sur les murs ou les piliers sur lesquelles l’archevêque Guifred de Narbonne le 19 octobre1053 fît une onction avec le saint- chrême au cours de la cérémonie de consécration de cette église abbatiale." Ces croix sont ordinairement au nombre de douze, mais dans l’abbatiale S t. Marie de Quarante, elles sont 16 ( ce nombre aurait-il ici, un rapport avec les deux consécrations, l’une de 983 et l’autre de 1053...?) "Les croix funéraires ou de cimetières furent à l’origine un attribut du martyre. Par la suite, on plaça des croix sur tous les tombeaux de tous les chrétiens, sans distinction et on érigea, à l’entrée ou au milieu du cimetière, une croix de pierre ou de bois d’un gravées travail plus ou moins remarquable." "Le signe de la croix. Déjà, parait-il, à l’époque des Apôtres les nouveaux convertis faisaient le signe de la croix à l’aide duquel les premiers chrétiens se reconnaissaient. Bientôt il devint un acte religieux qui accompagna toutes les actions, même les plus ordinaires. " Grégoire de Tours nous apprend " que l’on faisait le signe de la croix à table, sur les aliments que l’on se disposait à manger " et Gualther Jacques dit que " quand les chrétiens éternuaient, ils avaient l’habitude de faire le signe de la croix ." Nous n’ expliquerons pas ici les manières de pratiquer le signe de la croix. Mais le geste le plus courant doit se faire avec trois doigts, parce qu’on le dessine en invoquant la Trinité. Le rituel explique: " Qu’il doit se faire avec la main droite, les trois premiers doigts de la main sont ouverts, l’annulaire et le petit doigt restent fermés. Le pouce par sa force désigne le Père éternel, le créateur, le tout puissant; le doigt majeur est consacré à Jésus-Christ qui nous a rachetés et qui est relativement à l’homme la personne majeure de la Trinité et l’index intermédiaire entre le grand doigt et le pouce, figure le Saint Esprit qui unit le Père au fils et qui dans la représentation de la Trinité se place au milieu des deux autres personnes."

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8- Carte de repérage des croix de Quarante. Echelonnement des croix, du sud au nord sauf les croix

42-43-44. Carte I.G.N2545-0 au 1/25000ème.

4 4

4,

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9- Nomenclature des croix du territoire quarantais. 1. - Croix du pont de Pigasse. 1684 sous l’abbé du monastère. 2. - Des Pradels. (Chemin). 1876 t 3. -de S - Frichoux ou Rebaut. 1720 sous le curé Marragon. 4. -de Massal ou Borie-Blanche. 1670 sous l’abbé du monastère. 5. - de Malviès. 6. - de Pech de la condamine 7. -de Sériège. (château de). 8. -de Bellevue.(Château). 1940 sous le curé Sagne. 9. -de Curatier. 10. -de l’homme mort.(Carrefour). 11. -de Caillé. (carrefour de St.Privat) 12. -de la Ferme de Saint Privat. 13. -de St- Marc.(Chemin de St Martin). 14. -de Fontcouvert. 15. -de la Maladie. 1857 16. -d’ Espitalier. 1827 17. -de Saliès. (Carrefour, au chäteau) 1900 sous le curé Louis Vabre. 18. -de l’abbadié. (Place de). 1875 19. -du narthex. (entrée de l’église). 20. -de consécration. (sur les piliers et murs de l’abbatiale). 21. -du clocher de l’église. 22. -du puits des chanoines. (Abbaye). 23. - de la rue de St. Jean .(à l’entrée de). 24. -du cimetière de la chapelle Saint- Jean hors murs. 25. -de Laforgue. (Ex Py). 26. -du cimetière neuf. 1826 sous le curé Valette. 27. -de Saint- Antoine. (rue de). 1748 " Abbé du monastère. 28. -de Millade. 29. -du Peyral ou Calas. 1645 " Abbé du monastère. 30. -de Quarantette. 1650 " Abbé du monastère. 31. -de Rouèire. (parking d’entrée). 1676- 1877– 1900 " curé Vabre. 32. -de l’hospice de St-Jean de Rouéire. 1676– 1919 " curé Vabre. 33. - de Souloumiac. 1676 " Abbé du monastère. 34. -de Couquette. ( ferme de). 1589 " Abbé du monastère. 35. -de St -Jean- de- Conques. 1876 " 36. -de Pech-Menel. 37. -du cimetière des Huyères. (Uyères). 38. -des Arabes. 1831 sous le curé Gottez. 39. -de Juillet ou Julliette.(sur carte I.G.N. 2545) 40. -des Fargoussières. (Entrée). 1692 " Abbé du monastère. 41. -des Fargoussières. (sortie haute). 1730 " Abbé du monastère. 42. -des quatre chemins. Croix Niel. 2006 " curé Cuq. 43. -de Mimard aux Poulviès. 1993 " curé Frioux. 44. -de Font Bonne. Avant la révolution 1789 " l’abbé du monastère. 45. et 46 sont citées dans les archives de la municipalité de Quarante sans qu’il soit possible, à ce jour, d’en déterminer leur emplacement.

22 On a fait remarquer en page 4, que la plupart des domaines possédaient leur chapelle. Au-delà de celles-ci, le sol quarantais a reçu des croix au fil du temps, en plus ou moins grand nombre selon les périodes. Beaucoup d’entre-elles ont été abattues, projetées à terre comme celle du " Ferratayl " dont parle Louis Vabre ou encore, la croix de "Juillet " qui, brisée, portait une rose-croix occitane de belle facture. Gravées, sculptées, forgées ou coulées, elles sont pour la plupart récentes sans être antérieures au XVIè S. (Sauf celles de l’abbatiale gravées sur l’édifice et celle de Juillet).

1- La croix du Languedoc, Elle date de 1684 et est sculptée au dessus de la clef de voûte sud du pont de Pigasse. Il est le seul pont du canal à en être décoré.. Curieusement située à l’extrême sud du territoire quarantais, à la limite des départements de l’Aude et de l’Hérault, cette croix pleine de symbole porte le N° UN, dans la liste des croix quarantaises. Le pont de Pigasse recevait la route stratégique médiévale Narbonne / St.Pons, que coupait l’antique chemin Romieu, à quelques mètres au sud du pont (entre la ferme et le canal). A leur carrefour, est construit un bâtiment sur un linteau duquel est inscrite la date de 1764. Mais un acte de décès, d’un prêtre espagnol pèlerin de Rome, rédigé par le curé d’Ouveillan, mentionne que cette bâtisse portait déjà le nom de "Cabaret " en 1713. Cassini met ce lieu en commune de Capestang. Il appartient à la commune d ’Ouveillan au moins depuis 1713.

2- La croix des Pradels, Elle porte sur son piédestal une plaque indiquant le niveau d’eau atteint au cours de la crue d’août 1926 (1,4m) qui n’est pas mentionnée sur le registre communal de l’époque. Etymologie : Pradel en Oc : " Prat et El " semble indiquer : maison – villa – ferme. Les Pradels " Salinas quoe sunt in ipso Pradella " en 969. L’étang était salé. Latin : Salinae = salines Accord entre les religieux de St. Pons et l’archevêque de Narbonne. (H.G.L. t.11, p. 118 p) ; Dîmes: 13 juin 1634 – 1651. Pradel: prairie dans le midi de la France. Son piédestal a reçu l’inscription : IN.HOC. SIGNO. VINCES 1876. " Par ce signet tu vaincras ."

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3- La croix de St. Frichoux ou Rebaut. En 1907 il y avait encore une croix en pierre, remplacée depuis par une simple croix d’acier posée sur une mâture datée de 1720, à deux tables moulurées inversées en grès. En 1689, saint- Frichoux est documenté par la " Requête du prieur de François de Redon du régiment de Bourbonnais pour qu’il soit dispensé du paiement de la taxe ".(archives de l’Aude .Série -S- Instruction publique G. G. p.224 ). A Capestang, un autel dédicacé, mal connu, est dédier à St-Frichoux évêque de Tarragone martyrisé en 259. Toutefois, entre Capestang et Quarante, existe une parcelle qui porte le nom de St-Frichoux ou Fruchoux, corruption de St- Fructueux.(Ste.Arch.Béziers 8,p.391,23321) doc de 1689. Il y aurait eu au Moyen-Âge dans les environs du Rebaut, à proximité d’une campagne appelée Malviés, une autre chapelle rurale qui avait le vocable de St-Jean. Elle fut un théâtre sanglant pendant les guerres de religion, d ’après le texte suivant: "le dimanche 28 août 1569, le seigneur de St. Couat, ayant appris que le parti catholique tenait comme de coutume sa réunion annuelle à St -Jean de " Paracol " dans le lieu de Quarante à côté de Malviès, s’y rendit avec une compagnie de cavaliers Huguenots dans l’intention d’attaquer cette assemblée. Ils la troublèrent, en tuèrent un certain nombre, lui prirent un grand butin et se retirèrent à Castres avec trente prisonniers. etc." (Archives de la Société archéologique de Béziers Xème série –Volume III -2006-2007).Il faut donc comprendre qu’il y avait au Rebaut une chapelle avec son cimetière portant le vocable de StFrichoux, mais aussi une autre chapelle à peu de distance de la première, sur le domaine de Malviès au nord-est, consacrée à la confrérie de la Décollation de St-Jean-Baptiste.

Etymologie: Rebaut = moulin – ferme, mais également, une croix. En occitan " Ruba "en latin : Ripam avec le sens de pente, de vallée ou coteau, rives plus ou moins escarpée. .L’inscription, sur la mâture en grès, est difficilement lisible : O. CRUX AVE . . . . . . . . . . SI NOA 1720 (Salut. O. croix . . . SI . . . NOA. . . 1720).

4- Croix de la Massala à Borie-Blanche ou Borio-Blanco nommée aussi Malvièz. (Sur plan.N.F) . Elle est sensiblement identique à celle des Pradels. Etymologie :Borio : Nom probable de famille. (Noms et lieux de l’Hérault Ed. Abbé A. Cabrol). Massal : forme altérée de Martial (Centre d’étude Oc. Université Paul Valérie Montpellier). A proximité : villa romaine où ont été trouvées: Tagula- amphore- béton- Graufesenque,

24 marqués : "Félicis ma, volvs cosivs vrap "- Vase à parois fines-Lampe chrétienne à huile. Tombes à lauzes. - En 1705 Armand Aureille, propriétaire, vend une partie de la Borie Blanche au sieur Calas de Quarante. -En 1750, Jean de Quarante possède une partie de la Borie-Blanche, qui en 1739 serait devenue propriété de Joachim du Camp ( il y a peut-être eu une confusion dans la date, entre le 3 de 1739 et un 8 de 1789, par rapport à la date de 1750). - En 1890, les héritiers de Mr. Montagne – Aureille, auraient détenu la propriété. - En 1530 est cité un certain Guiraud. Propriétaire Le document cite un Aureilli venu de Massac. -En 1753 : Armand Aureille de la Borie- Blanque. - En 1776: Moreau propriétaire imposé d’office pour un prêt et ….! - En 1806 : Mr Malaret était, semble t- il, le gendre de Mr Moreau propriétaire. Le piédestal a reçu l’inscription suivante: CRUX . . . O . . . CL . . . AV. Salut ô

croix

1670

AV 1670)

5 – Croix de Malviès. Les archives municipales de Quarante mentionnent que "Noble Mahieu d’Assignant était, le 16 nov 1788, seigneur justicier haut, moyen et bas, de Quarante." (Archives de Quarante. Registre 1731/153).

Il semble que Jean-Antoine de Brettes-de-Turin ait été seigneur de Malviès. (Arch. de Narbonne 1777 p. 127 série G.G, Aude).

Malviès ou Malvers 1071 ou encore Malviez. Malviès, en 1777 (Seigneurie de) supplique de Pierre-Paul de Rousset, citoyen de Béziers, pour faire enregistrer l’hommage qu’il a rendu pour la seigneurie de Malviès dans le territoire de Saliès au diocèse de Narbonne, commune de Quarante. (Arch.de Narbonne p.127,B23431, série GG, Aude) Etymologie : En Oc. : Malva - Mauve (Malva sylvestris) ou Mauvaise route (Abbé Giry).

6 – Croix du Pech de la Condamine. Sans histoire marquante, elle fut dressée vers 1975 par Mr Farret D’Astier à l’entrée du chemin des oliviers de la condamine, dont il est propriétaire. IL l’aurait récupéré d’un autre lieu et érigée là pour marquer l’entrée du chemin des oliviers.

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7- Croix de la ferme de Sériège. Sériège vient de sedes regia " de siège royal." D’après la famille Andoque, la croix aurait été érigée à la suite d’un accident au 19èS. En 1673, Sériège était encore une propriété de l’abbé de Quarante. (Arch.dep. Série H -11H ). La chapelle St Madeleine de Sériège a été visitée par un représentant de l’archevêque de Narbonne en 1404 (pour l’histoire de Sériège et la famille Andoque, voir le texte dans l’étude " La rivière Roquefourcade de Quarante, J.Coupat 2009 " et la généalogie des Bringer de l’Hérault. La propriété de Sériége et sa chapelle appartenaient au chapitre de Quarante depuis 1230, d’après des documents d’archives de l’abbaye de Quarante. Les bâtiments de Sériège ont été incendiés, lors du passage de la compagnie du Prince-Noir d’ Angleterre, venant d’Aubian dans la journée du 11 novembre 1355, d’après les archives de la famille Andoque ou d’Andoque.

8- Croix de Bellevue. Monsieur Rouanet, propriétaire de cette campagne, appelé sous les drapeaux en 1940, est fait prisonnier en 1942. Son épouse, restée à l’exploitation, fait le v œu d’ériger une croix si son mari revient de cette détention. " Si mon mari prisonnier revient de sa détention, j’élèverai une croix " proclame-t-elle! Son époux revenu, la dame tînt sa promesse.

9- Croix de Curatier . Croix sans histoire apparente particulière. Elle était au bord du chemin de Curatier à Saliès, à la limite de la parcelle appelée "de la croix." Elle fut déplacée, côté ouest du chemin, lors du charruage de cette parcelle. Le cadran solaire déposé au Musée de Quarante a été trouvé en 1964 dans la vigne " Borie de Curatier ." Sa forme conchoïdale en fait une pièce rare. Curatier 1809- Curatiès 1840- Curatier 1856. Etymologie : Provient du métier de corroyeur. Marchand de cuir. En Occitan : Curatier. Cette croix ne porte pas d’inscription.

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10- Croix de l’homme mort ou Croix de bois. Située au carrefour du chemin de l’ancienne ferme ruinée Rusquier et de celui de Fontbonne, elle n’a pas retenu d’histoire particulière. Elle pourrait être un possible repère de carrefour sur l’ancien chemin d’Ouveillan à Creissan , mais aussi la croix du lieu d’un possible accident " d’un homme " rapporte la rumeur locale. Il n’est pas possible de la dater, par sa croix actuelle et encore moins par son piédestal, mais il est possible que sa seconde appellation fasse penser à l’existence d’une croix en bois ayant précédé l’actuelle en métal coulé (fonte).

11- Croix du carrefour de Saint-Privat ou Caillé. Elle n’est séparée de la parcelle St-Jean, en territoire de Cruzy, que par la route de Quarante / St- Privat à Sériège. Au dire des autochtones, cette croix fut élevée pour le décès de deux enfants, probablement morts, en ce lieu. Elle peut aussi être considérer comme croix du carrefour médiéval, de la route d’Argeliers à Quarante, que coupe le chemin de St-Martin à Cruzy appelé le CAMI ferrat ou Vimaire en territoire Cruziat ).On la nomme " croix Caillé " elle est portée sous ce nom dans les archives municipales.

12- Croix de la ferme de Saint.- Privat. La ferme de St Privat propriété de l’ex-famille Redon et en dernier de veuve Margot Laborie, précise que son feu mari Hubert : - "aurait placé la croix sur la murette du fossé sans raison particulière." Peut-être a-t-il eu l’arrière pensée de vouloir perpétrer la vocation chrétienne initiale de ce lieu? (voir la silhouette d’un abbé sur la girouette de la tour.)

Cette croix située, entre le bâtiment de la ferme et la route, est solidaire du muret qui longe la courbe du ruisseau. Cet ancien chemin de Sériège, longe la façade de la ferme puis passe par l’ancien moulin de St-Privat, avant de franchir le cours de la rivière et monter par la rue des Baumes pour gagner le cœur du village de Quarante par la rue St -Jean.

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13- Croix Saint-Marc. On se rendait en procession à cette croix le jour de la fête du saint (le 25 Avril), auprès duquel on intercédait pour la conservation des fruits de la terre. Son piédestal était, par le passé, surmonté d’une vierge. Celle-ci, cassée disparue en partie, puis fut remplacée par une croix en acier forgé. Cette vierge est actuellement en deux morceaux, - l’un, chez Mr. Dupart, -l’autre, resté introuvable chez la famille Rech qui le possédait . Cette croix à la sortie Est du village, sur l’ancien chemin de Quarante à St Matin se situe à l’angle droit du haut talus bordant le terrain de Mr Dupart.

14- Croix de Font-Couverte. Cette croix en pierre sculptée de belle facture, qui avait reçu la visite de l’évêque de Montpellier en 1980, a disparu peu de temps après son passage vers 1981, au dire des anciens propriétaires. Etymologie : Font-couverte (fontes) : sources. -Font : en oc. Coberta . Ce nom peut également s’écrire :Fontcouverte. Cette stèle n’est pas datée en apparence.

15- Croix de la maladie. En février et mars 1663 la petite vérole fait à Quarante un décès chaque jour. En 1857, cette croix, un don de Madame Balme veuve Lafont et de ses filles pour l’un des leurs morts de cette maladie, sera dressée rue des Baumes. Cette seconde épidémie de petite vérole ravagea le village en emportant pas moins de trente enfants. Une procession fut demandée par les paroissiens vers cette croix. Après l’érection de cette dernière suivie de la procession, l’épidémie cessa. On perpétua la procession, jusqu’aux années 1965 le Jeudi Saint, en remerciement des guérisons. Coïncidence ou miracle?... Etymologie : Maladière – nom de hameau ou de lieu dit, désignant une ancienne ladrerie ou léproserie. Croisement du nom " malade " avec " ladre " donne : lépreux.

28 Cette maladie en provenance d’Asie est transmise en Europe par les sarrasins. Maladie, en Oc :moulaoutié . . Ci-dessous, Louis Vabre, curé de la paroisse depuis 1894, explique en 1903, l’origine des processions à la croix de la maladie. " Le nombre des décès s’éleva, en l’année 1857, du fait de la petite vérole qui sévit dans la paroisse durant les mois de Février, Mars, Avril. Au milieu de l’effroi général, les paroissiens prièrent Mr le curé Sagne de faire une procession, le Jeudi - Saint, à la Croix dite de la maladie, placée sur le chemin de St Martin, par la ferme de St Privat. Les survivants nous ont assuré, par serment, que l’épidémie cessa aussitôt ses ravages. Pour en remercier Dieu, les habitants promirent de continuer cette même procession le Jeudi - Saint. Nous avons le bonheur de constater depuis notre présence dans cette paroisse, c’est-à dire de 1894 à 1903, que les promesses ce sont réalisées. Nous avons compté, de nous même, les assistants à cette procession, et le nombre d’hommes, malgré les circonstances si opposées à la foi chrétienne, s’éleva à 280. Toutes les femmes, à quelques rares exceptions, y prennent part. La tradition veut que les chantres chantent les litanies de l’agonie de Jésus, le peuple répond :…-Christum Régem pro nobis crucifixum vénité adorémus… Désireux de garder cette page honorable pour la paroisse, nous l’avons placée en tête des actes de l’année 1857 " Louis Vabre Sans remonter à l’époque ancienne de cette calamité (662 ), il est vraisemblable que l’appellation de cette croix ne date que depuis son érection en 1857. Certains avancent que l’emplacement choisi serait celui d’une ancienne léproserie. On peut en douter. Du reste, il n’est pas mentionné la présence d’un tel établissement sur l’une des voies ancienne d’accès au bourg des plus importantes, ni dans les archives communales, ni dans celles de l’abbaye, et encore moins retrouvé d’anciens vestiges. Elle porte l’inscription suivante : O - CRUX - AVE

(Salut ô croix.)

16- Croix d’Espitalier ou croix des outrages. Le nom de cette croix provient des archives des "chemins communaux" Quarantais. Scellée dans la façade de la maison Blaye-Cuillé, elle présente une hallebarde croisée d’une lance munie d’une éponge symbolisant la Passion du Christ. Il est peu vraisemblable qu’elle soit en relation avec Guillaume Espitalier né le 11 fev.1648 et décédé le 9 mai1648 et. inhumé au cimetière St Jean. Cette croix aurait été déplacée lors de l’aménagement du carrefour dans lequel elle se trouvait (celui des cafés), puis scellée sur la façade de la maison actuelle. Certains avancent l’hypothèse, quelle serait le lieu référent de la quarantième borne milliaire* qui serait à l’origine du nom du bourg de Quarante. Elle porte la date de 1827 sur le bras horizontal gauche. *(Démonstration du Père Rouanet de St Chinian.)

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17- Croix de Saliès. Le lieu de Saliès a été, jusqu’en 1790, une paroisse au service de 14 métairies périphériques, comprenant plus de 212 habitants en 1792. Les recteurs, Marc Chabert desservit cette paroisse de 1660 à 1681 et Joseph Marragon en 1726. Cette paroisse, dont la chapelle rurale romane semble être de la fin du 12è.S (Voir étude J. Coupat d’août 2005), posséda son école dans laquelle les garçons reçurent déjà l’enseignement du latin en 1736. Etymologie: Ce lieu est l’emplacement d’une villa gallo-romaine : Villa Ciliano. Lat. : " Cilius + suffix : Anum ". La croix, des années 1900, appartient à la paroisse de St. Barthélémy du lieu, au pied de laquelle se trouvait un cimetière antique qui aurait été supprimé en 1790. Derrière la croix, certains ouvriers " défonçant " la parcelle limitrophe, auraient aperçu comme des marches à 1 m. de profondeur. L’abbé Giry dans son étude " Le Biterrois en Narbonnais page 292 " écrit "qu' il pourrait s'agir de l’entrée d’une glacière romaine" garnie en viande de la montagne et en sel des étangs salins de Capestang ou des pradels de Quarante. Origine du nom . (voir étude de la chapelle de Saliès par J. Coupat). La consonance du nom Saliès, peut faire penser à "sel ." On note, (dans le dictionnaire des " Pyrénées de A. Levy, éd. Privat") que la ville de Salies-de-Béarn doit son nom au sel qu’elle produisait.. Cet endroit aurait pu être propice aux salaisons et donner lieu à un nom dérivé de cette action. Toujours est-il, que Saliès est connu par l’intermédiaire "d’un jugement de 782 ,des commissaires du roi Charlemagne, en faveur de l’archevêque de Narbonne -Villa de Ciliano" (Cassini) donne "Villa de Ciliano". La croix de Saliès érigée par Mr Charles Viennet propriétaire du domaine, a été indulgenciée par l’évêque de Montpellier, Mgr. De Cabrière et le Pape Pie X (Source familiale Viennet) dans les années 1900. En 1647, le 10 décembre, Messire Louis Esprit Viennet, prêtre et conducher de Saint Just et Pasteur de Narbonne, avait été nommé à la dite curé et vicaire de Saliès.

18- Croix de l’abbadié. Cette croix occupait l’emplacement central de la place. Louis Vabres, en 1903, raconte : « Dans ce même mois de février 1903, la paroisse a été témoin attristé du déplacement de la croix. Placée depuis trente ans au milieu de la place de l’abbaye, c’est à dire, à la place d’honneur, par le vénèré et regretté M. Cabanés curé. Elle a été démolie par ordre de M. Jean Paulet, veuf Lacombe, maire, aux frais de la mairie. Le maire a déclaré, après l’avoir enlevé, que la mairie n’avait point d’argent pour la relever.

30 Elle a été placée au sortir du portail de l’Eglise à gauche, aux frais de messieurs, Gabriel d’Anodique et Charles Viennet notables quarantais . Le premier, Mr Gabriel d’Andoque*, héritier du domaine de Rouéïre, fit construire son château en 1887. Le second, Mr Viennet, propriétaire du château de Saliès était ordonnateur du bureau de bienfaisance, membre de toutes les associations charitables de sa ville : Béziers * Le nom de Gabriel Andoque ne porte pas la particule d’après les recherches N°4 de l’université Paul Valérie de Montpellier 1989, le curé L. Vabre lui en a mise une.

Cette croix porte sur son piédestal : "O.

CRUX AVE 1875."

(Salut ô croix

1875).

19- Croix Pattée du Capitoul ou Narthex. Cette croix, qui fait partie de l’édifice depuis ses origines, soit 1053 (d’après la deuxième consécration de l’abbatiale) est la plus ancienne du territoire quarantais. Elle est le symbole qu’a eu l’honneur de porter l’ordre des chevaliers templiers. Or, l’église fut consacrée en l’honneur de Notre-Dame, avec les autels de: St. Dalmace et de St. Lamdebert, de la sainte croix et de St-Jean- Baptiste. L’abbatiale de Quarante. Avant 1037, il y avait déjà, dans le lieu de Quarante, des chevaliers de S t-Jean, puisque le chanoine Guillaume Aribert de l’abbaye du lieu leur fait un don cette même année. Sans affirmer, on peut imaginer qu’au 11ème S. notre église abbatiale ait pu avoir les privilèges de l’ordre naissant des chevaliers de Saint-Jean établis sur le territoire quarantais. Cet ordre aurait pu inspirer les bâtisseurs lombards d’incorporer au cordon de l’arc polychrome du portail, l’entrée actuelle, l’emblème de cette chevalerie. La présence de cet ordre dans le bourg de Quarante, comme dans ceux de Capestang, Ouveillan, Preissan, peut expliquer cette présomption, d’autant que la collégiale d’Ouveillan, avec sa congrégation de 7 membres consacrée à l’œuvre de Jean l’Evangéliste, porte depuis ses origines, double croix pattée sur son fronton. Cette collégiale est donnée pour être la sœur de l’abbatiale de Quarante, toutes deux sont signées du même emblème " la croix Pattée ." La Collégiale d ’Ouveillan.

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20- Croix de Consécration. Elles sont au nombre de 16 gravées (sans doute dû à la double consécration de 983 et 1053 sur les piliers et contres forts de l’abbatiale de Quarante. Aussi anciennes que la croix pattée de l’arc du portail d’entrée, elles certifient la consécration de l’édifice. On donne ce nom à des croix peintes ou sculptées dans l’intérieur des églises et sur lesquelles l’évêque fait une onction, avec le Saint-Chrême, dans la cérémonie de la consécration du lieu sacré. " Ces croix sont ordinairement au nombre de douze ," indique Mr. Viollet-leDuc qui en a publié plusieurs facsimilés du XII, XIII, XIV, et XVème S. La consécration est un rite liturgique par lequel on affecte au service de Dieu (ici une église) qui par là, entre dans la catégorie du sacré. Toutes les églises ne sont pas consacrées. Le 14 des calendes de 1037 Guillaume Aribert, par ses dons, nous fait connaître l’existence de l’hôpital de Jérusalem et des Chevaliers du lieu de Quarante. La présence des chevaliers de St Jean sur le territoire de Quarante, a fait naître un culte à la dévotion de St-Jean-Baptiste qui est, à ce qu’en dit la légende, très ancien. Pour le prouver on s’en tiendra aux textes qui nous renseignent. -Le premier,1053, celui de la consécration de l’abbatiale et de l’autel St-Jean-Baptiste. Des dons et échanges s’en suivront, au bénéfice de l’œuvre et ordre de Saint-Jean. -Le deuxième, le 6 mai 1249, le pape Innocent IV adresse une bulle à l’abbé Guillaume III, " qu’il confirme, dans ses droits, ses privilèges, ses exemptions d’impositions séculières, et lui maintient le pouvoir de continuer de célébrer les offices à voix basse devant l’interdit général consécutif à l’hérésie Albigeoise, dans les églises soumises à son autorité, notamment dans celle de St.-Jean-de-Caps à Mailhac." -Le troisième, le 23 août 1404, le représentant de l’archevêque de Narbonne visitant les églises et abbayes de son diocèse, " il vit dans la paroisse de Quarante, une confrérie d’hommes érigée en l’honneur de la Décollation de Saint-Jean-Baptiste, ainsi qu' une chapelle ," sans préciser son lieu. -Le quatrième. A Quarante, sans avoir de grandes chapelles consacrées à St-Jean-Baptiste, (il est écrit ,qu’au lieu dit de St-Jean de Conques, une croix marquerait l’emplacement d’une ancienne chapelle), le bourg a cependant une longue et grande dévotion à ce saint et s’honore même d’avoir un reliquaire à son effigie. Déjà en 1053 au moment de la consécration de l’abbatiale placée sous le vocable de Ste- Marie, on voit une chapelle de l’édifice porter le nom de Saint-Jean-Baptiste. Les Chevaliers de St-Jean-de-Jérusalem et les Templiers, qui possédaient deux domaines dans le territoire du bourg, développèrent le culte à St-Jean- Baptiste . D’ailleurs, l’abbatiale possède encore un petit autel, sur les quatre petits qui occupaient le lieu. Par sa pierre de messe retrouvée dans le clocher gravée de six croix templières remarquables, on l’admet comme étant l’autel consacré au Précurseur en 1053. Le 25 mars 1439, au moment où l’abbé de ce lieu, Jean de Quarante, (désigné sous ce nom dans H.G.L.) assistait à l’entrée dans Narbonne de son archevêque Jean d’Harcourt, un certain Jacques Maurel " tailleur d’images " travaillait à Montpellier. Cet abbé Jean, a-t-il vu dans le précurseur Jean-Baptiste son protecteur ? C’est alors qu’il aurait demandé au célèbre sculpteur Montpelliérain de lui réaliser le reliquaire prestigieux qu’on connaît, renfermant dans la capsule céphalique d’éventuelles reliques de St -Jean- Baptiste et dans la pectorale, une esquille de la vraie croix.

32 ( Il est écrit, que Jean-Baptiste aurait été brûlé sous le règne de Julien l’Apostat et ses cendres mélangées à ceux d’animaux.) Alors, comment expliquer ces reliques?

Au sujet du buste reliquaire du Précurseur . Cette œuvre, d’un grand talent, de l’orfèvrerie montpelliéraine et de l’art méridional, est signée des initiales de l’artiste JM puis marquée du poinçon des orfèvres de la ville de Montpellier composé de la fleur de lys et de la lettre Pau centre desquelles se place un dauphin recourbé sur lui-même. La composition du poinçon permet de connaître le lieu et la date de l’exécution de cette

œuvre. Le lys et le dauphin sont les armoires de Montpellier, la lettre P certifie l’année, puisque Jean Thuile écrit : " l’année 1427 est restée inoubliable dans l’histoire de l’orfèvrerie, car c’est d’elle que date, à Montpellier, l’institution de ce poinçon, qui sur le vu de son efficacité, fut adopté peu à peu par toutes les communautés." Ceci nous conduit à préciser la date d’ exécution du buste de St- Jean :

P étant la 16éme lettre de l’alphabet, on en déduire: 1427 + 16 = année 1443 Beaucoup de documents ont porté la date de 1440 ou 1441. Le buste reliquaire, est la pièce maîtresse du trésor de l’église abbatiale de Quarante visible, dans la salle forte du dépôt lapidaire . "Il est façonné en plaques d’argent martelées au repoussé et Capsules reliquaires Profil du buste de St Jean Bapt. ciselées, rehaussées de vermeil pour la chevelure et la barbe. Le saint est présenté avec les épaules recouvertes de peau de mouton, et son faciès présente, d’un coté le visage du martyre, de l’autre, le visage du mort." Souffrant et apaisé. Vivant et mort ." . On retrouve, dans cette œuvre, la main de l’artiste talentueux qui exécuta de Photo J. Coupat nombreux et réputés gisants " appelés à préfigurer la mort comme le repos de la vie ", fait observer J.Thuilé. On pense, plus particulièrement aux tombeaux de Charles Ier de Bourbon en l’abbaye de Souvigny et à celui du roi René en l’église Saint-Maurice d’Anger.

33 La fête votive de St-Jean-Baptiste en sa Décollation à Quarante, était célébrée le 29 août de chaque année. Pour la raisons de vendanges plus précoces, cette foire de grande réputation régionale jusqu’au début du 17ème S., fut avancée au 19 août ,depuis le milieu du 20ème S. Anciennement, les nombreux pèlerins (de 7 à 8000 personnes à l’époque médiévale) venaient de loin vénérer la relique du Précurseur et lui demander souvent la guérison des maladies de la tête. Cette fête se faisait surtout à l’occasion de la cérémonie religieuse du saint-patron du bourg de Quarante St Jean-Baptiste et se tenait non loin de l’étang des Pradels, au lieu de Parazol, près de la métairie de Malviès. (Archives de Béziers). Elle était probablement installée là en raisons des commodités qu’apportait la proximité de l’étang des Pradèls et la proche présence de la commanderie de Preissan, lien étroit avec les hospitaliers de St Jean et donc avec St Jean-Baptiste et son effigie présente en ce lieu ce jour de fête. L’eau et la végétation, indispensables aux animaux de la foire, facilitaient la vie des pèlerins. Cette fête et foire conjuguées existaient déjà en 1550. En 1576 date de leur transfert dans le village de Quarante, les offices religieux de la St-Jean-Baptiste eurent lieu, tout d’abord dans la chapelle St-Pierre de Quarante jusqu’à sa ruine en 1780, puis par la suite, dans l’abbatiale Ste- Marie. Les confréries de St-Jean-Baptiste et des Pénitents blancs ont existé à Quarante jusqu’à la révolution. La dernière exerçait son culte dans la chapelle St-Jean hors mur, rue St-Jean. Ancienne propriété de la famille d’Andoque qui en fit dont, sous conditions, à la Fabrique de Quarante. Depuis les années deux mille, désaffectée, elle est devenue une salle municipale avec jardin d’agrément.

Les coquilles de Quarante. Un symbole fort, présent sur les piliers de l’arc triomphal de la travée du transept de l’église de Quarante, "les coquilles" (Concaves rayonnantes vers le haut) ,elles sont l’emblème de St-Jean-Baptiste dans le baptême, celui des confréries du même nom et des chevaliers hospitaliers locaux; alors que (Convexes rayonnantes vers le bas), elles deviennent le symbole de l’ordre de la chevalerie du Mont St-Michel ou celui de StJacques de Compostelle. Ce dernier n’est nullement représentatif dans le village de Quarante, dont le seul culte reconnu par écrits et les instances religieuses en 1404 et même avant, est celui de St-Jean-Baptiste. Bien sur que, comme ailleurs, des pèlerins de St Jacques et d’autre confessions, sont passés dans cette église, mais cette abbatiale n’a pas la vocation jacquaire que certains lui prêtent. (François premier les portait en collier et St-Jacques sur le devant du chapeau, la cape et à la poignée du au bourdon). 1 Fresque de la Co-cathédrale St-Jean de Lavalette (Malte), représentant le chef de St-Jean-Baptiste dans une coquille concave. 2- Abbatiale de Quarante consacrée 3- Grange Haute Aussi à St -Jean-Baptiste .

Coquille.

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21- Croix du clocher. Les corniches du XVème S. de la surélévation du clocher, reçoivent un petit chemin de ronde d’où l’on domine la plaine narbonnaise et les Pyrénées orientales au sud, puis les contreforts du Saint Chinianais de l’ouest au nord. Ce champ de vision permettait, aux vigies, d’apercevoir à une douzaine de kilomètres, les nuages de poussière soulevée par les mouvements de troupe, par temps clair et sec. Elles pouvaient prévenir la garnison du lieu, environ deux heures avant que les chevauchées soient aux murs de défense du bourg de Quarante. Selon les traditions (page 19), l’actuelle croix, établie à la pointe du clocher, est surmontée d’un coq girouette anti-foudre de facture récente (2005). Il a remplacé le précédent coq trop vétuste et au paratonnerre défaillant. Il ne faut pas être surpris de l’appellation "abbadié " attribuée à la place de l’église par les anciens du village, il provient du terme " abade " qui, selon la tradition, se traduit en occitan par "abadée " signifiant – guet, lieu élevé propre à servir pour guetter. Nous pouvons y voir aussi une origine étymologique des noms : Abbaye – Abbatiale ou abbé. Au sujet de l’élévation du village de Quarante, Robert Hesselh rapporte un dicton énoncé dans un dictionnaire populaire universel de la France de 1771.( voir page 45).

22- Croix du puits de l’abbaye. De construction romane, ce puits excelle par sa cylindricité, par la qualité de son appareil travaillé en arc de cercle, par sa profondeur de 22m. environ (18 m. au miroir), par la tripode potencée en fer forgé à volutes, qui le surmonte. Le rebord de la margelle de 1,3 m. de diamètre en légère saillie, accuse l’usure prononcée des années de pose des sceaux et du frottement des habits de bure des chanoines. S’il était autorisé de fouiller ses dépôts vaseux, "les trouvailles " tombée accidentellement ou pas et tapissent le fond, nous renseigneraient sur le passé de l’abbatiale (comme celles du puits de la place de l’église à Cruzy). La croix placée au faîte de la potence tripode, se dressée en majesté. En se détachant des autres croix des clochers d’arrière plan, elles composent par hasard un ensemble trinitaire involontaire. (photos ci-après J Coupat. )

35 . Les trois croix

.

La cr o ix potencée du puits.

23- Croix de la rue Saint-Jean. L’édicule, surélevé et incorporé au mur ouest de l’ancienne maison " Galtié ", reçoit une croix dressée sur un piédestal. Peut-être un calvaire hors murs de la cité? Elle ne semble pas avoir eu d’histoire particulière, si ce n’est qu’elle se situe au début de la rue S t-Jean (qui descend à l’ancienne distillerie) près de la chapelle de la confrérie St-Jean toute proche, dans laquelle les pénitents blancs se réunissaient pour leurs offices, avant la révolution. Cette croix porte en son centre l’étoile à six branches , qui d’après son exécution et style, semble contemporaine. Possible lien avec Jésus le Juif ou la juiverie locale.

24- Croix du cimetière de la Chapelle Saint-Jean. Cette croix, façonnée et installée sur le socle de l’ancienne croix disparue, l’a été par, MMr Marc Chassagneux et Jacques Coupat, deux bénévoles, à la demande de la municipalité. Par l’épanouissement des extrémités de ses bras, elle symbolise les Chevaliers de St-Jean- de-Jérusalem. Le Christ, stylisé, penche symboliquement la tête à droite. La branche verticale, porte le blason communal, derrière lequel une cavité scellée reçoit un manuscrit. Celui-ci relate brièvement l’histoire de cette chapelle et son cimetière. La date frappée, du 30/05/2005, est celle de son installation accompagnée des initiales des personnes ci-dessus désignées: MC-CJ.

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25- Croix Laforgue. La propriété dans laquelle se trouve cette croix appartenait à la famille Laforgue, puis Py, à la fin du vingtième siècle. Entouré au nord et à l’ouest par d’anciennes fortifications dans le prolongement de celles des bâtiments conventuels, le terrain sur lequel repose cette croix fut un potager des chanoines. Cette croix, en acier d’une simple facture, enfichée dans une colonne cylindrique en calcaire, repose sur un piédestal précédé d’une marche pavée en légère inclinaison, destinée à ceux qui s’y recueillaient. Par l’absence de date et de même style que d’autres croix locales, on la date de la fin du 19ème S. Elle reçut l’inscription suivante idem à d’autres croix du lieu: IN. OC. SIGNO – VINCES " Par ce signe tu vaincras."

26- Croix du cimetière neuf. Ces croix sont appelées " croix hosannières " parce qu’en ce lieu on y bénissait les rameaux en chantant " l’hosanna ". Là aussi, l’absence de date ne permet pas d’en certifier l’exécution, mais un document d’artisan fait état d’un avant métré de 1825 pour le nouveau cimetière. Celui-ci était prévu pour une croix en pierre à placer au milieu du site. La prévision, sans doute du piédestal, donne un volume de 1m3. Le cimetière neuf établi en 1826, donne une référence de date, à l'érection de cette croix et à l’arrêt du vieux cimetière de l’abbadié.

27- Croix du portail bas ou Saint- Antoine. Elle est aussi appelée " croix de la Belou." Enfichée dans un tronc de colonne cylindrique placé devant la maison du 8 place St-Antoine, elle servait de station de rogations. La date de 1748 est frappée au pointeau sur la base de la mâture de la croix rudimentaire en acier forgé. En remontant la rue, sur vingt mètres environ à gauche, on trouve encore le linteau monolithe en pierre, de l’entrée de la première école du bourg datée de 1668.

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28- Croix de milliade ou millade ou milhade. Le dictionnaire donne comme définition : Milliade : inconnue. Milhade : inconnue. Millade : voir milias ou milas ; espèce de bouillie faite avec des grains de mil ou de maïs. Cette croix marquait la limite, entre la paroisse de Saliès et celle de Quarante, avant 1790. Certains donnent l’emplacement de cette croix pour celui d’une borne milliaire de la supposée voie romaine Montpellier/ Carcassonne, que des études font passer plus au sud. Elle aurait emprunté, en territoire quarantais, le chemin de " Carrière / Estrade " qui n’est pas le chemin " Romieu " (voir carte ci-après.) L’étymologie de milliaire provient du Latin " milliarus ".

Remarque : Sur environ 46 villas romaines, actuellement dénombrées sur l’ensemble du territoire de Quarante, 70% d’entre-elles sont localisées au sud d’un axe Rouèïre / Saint- Privat. ( voir carte page 38.) Leur plus forte densité d’occupation des sols se situe dans la zone de plaine, entre le tracé A de "Carrière / Estrade " (Font-Couvert / St-Martin /St-Privat) et le tracé B celui de " Romieux " (Capestang / La Croisade). Cette localisation semble prouver que les occupants de ces villas côtoyaient des axes de communication importants et travaillaient un terroir plus riche et plus facile dans ces plaines alluvionnes vallonnées. Le musée de Quarante donne un aperçu de la présence romaine locale et de la richesse de ses occupants. Les clichés ci-dessous, du contenu de certaines vitrines de cette collection, permettent d’apprécier ce trésor et de remercier à cette occasion, les amateurs archéologues qui, par leur persévérance et minutie, ont su répertorier, étudier, classer et créer une association sans lesquels, ces joyaux, témoins d’un riche et lointain passé, n’auraient pas pu être appréciés .

Ci-après : carte Michelin au 1:25000 par les romains.

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n° 2545. Graphisme de la principale occupation du sol quarantais

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A A A

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0

B

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29- Croix du Peyral ou croix de Lapeyrouse. Etymologie : Peyral : pierre – en oc. "Péira ". Latin : Petrain – Amas de pierres naturelles ou restant d’une bâtisse ruinée ou de carrière. Cette croix est située au carrefour que forment le chemin de Couquette avec la route de Béziers/Creissan. Les gens s’y rendaient lors de rogations. Son assise, une ancienne pierre de meule, reçoit une colonne de grès octogonale, sur les pans inférieurs de laquelle sont gravés, le nom de Calas et la date de 1645. Surmonté d’une croix latine en acier forgé, elle aurait été élevée, dit-on, suite à une épidémie. En 1711, P. Calas possédait la condamine de la ville, une terre dite " Lapeyrouse " (L.V. p 240). Le nom de Lapeyrouse est aussi celui du curé de la paroisse en 1820 ou 1824, qui lui léga 150 f.

30- Croix de Quarantette ou de l’abondance. Etymologie particulière. Ce nom peut être considéré comme un diminutif de Quarante. Par son assise cylindrique de meule de moulin, elle est similaire à la précédente croix du Peyral. Son fût carré en grès reçoit une croix ouvragée en fonte. Située prés de la cuve Est de la cave coopérative, les anciens rapportent " Qu’au Moyen–Âge, près d’elle, on aurait inhumé les enfants morts nés ou qui n’étaient pas baptisés." Elle à longtemps fait l’objet d’une procession le troisième jour des rogations. Cette croix n’a pas reçu de date, mais sa similitude avec celle du Peyral, permet de la dater des années 1650.

Remarque Avant de poursuivre la litanie des croix, plus particulièrement l’explication des trois suivantes, revenons sur les chanoines de Quarante, leur abbatiale et la relation qu’ils ont pu avoir avec le culte de S t-Jean-Baptiste.

A Quarante, pourquoi une telle vénération pour ce Saint-Précurseur ? " Les chanoines, souvent confondus avec les moines, constituent une catégorie particulière entre le clergé séculier, c'est-à-dire, vivant dans le monde profane proprement dit. Ils constituent généralement, sous la Règle de Saint Augustin, un chapitre cathédral, car associé à la vie d’un diocèse autour de l’évêque ou de l’archevêque qui en à la charge." C’est ainsi qu’à Quarante, il y eut une abbaye d’hommes qui embrassèrent la règle de St Augustin au XIème S. a rapporté Mr Corsier, chargé par l’archevêché de visiter toutes les églises du diocèse de Narbonne en 1404. La vie de St. Augustin a été de près, celle qu’a vécu, dans le désert, S t- J-Baptiste.

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31- Croix de Rouèïre ou Rouèyre, entrée , parking. Etymologie : désigne " le chien blanc?... ou pubescent." En Oc. : Rove. Roire, dérivé du latin " Robur-orem." Cette grande croix ouvragée, en acier, scellée dans un piédestal calcaire, cubique à table, porte sur trois faces les dates de 1676 -1877 -1900 et sur la quatrième face le nom de Rouèïre. Cette croix fait penser à un lieu de missions ou de

rogations. Son emplacement peut évoquer l’ancienne entrée de l’hospice St-Jean. La date de 1676, portée sur l’autre croix t Rouèïre, sur celle de S -Jean de Conques et du carrefour de Souloumiac, témoignent de la même mission. Nota : Certains documents portent la date de 1474 au lieu de 1676

32- Petite croix de Rouèïre. Elle se situe dans un petit jardin, derrière la tour carrée des bâtiments de Rouèïre. Cette discrète et élégante croix d’acier forgé aux bras terminés par un fer aigu en forme " d’as de pique " est munie de quatre volutes à la croisée des bras. Enfichée dans une colonne cylindrique calcaire de 1,5m de hauteur, l’ensemble repose sur une embase cubique calcaire d’environ 0.60 m. Il se dit que cette croix fut placée contre le mur du château par Mr d’Andoque, l’ancien maire du village. Elle a reçut les inscriptions suivantes O. F. D. S.

1676-1912 ou1919.

Au sujet de l’acquisition de Rouèïre par le chapitre de l’abbaye de Quarante, un acte d’échange certifie qu’elle s’est réalisée en 1262. Or, que lit-on dans l’étude N°4 de 1989 de l’université Paul Valéry de Montpellier, que : "Françoise Tarboriech (1783 – 1825), veuve très tôt avec quatre enfants, elle leur laissa en mourant, le domaine du Terral, le domaine de Rouèïre qui était aux Tarboriech depuis le XIIe Siècle, et les Pradels " …! Ce en quoi, il y a probablement une erreur, puisqu’au XIIè S., Rouèïre était encore la propriété des chanoines de Capestang. La société archéologique (Histoire de Capestang, p.395) mentionne, "qu’en 1115 la communauté des chevaliers de St-Jean de Capestang était une des plus anciennes de la province (H.L.). Ermengaud Romieu lui fait d’ailleurs une donation." C’est quatre ans après 1115 et l’annonce de l’existence de cette communauté, que sera officiellement fondé l’ordre des Templiers en 1119, qui précèdera d’un an celui des Hospitaliers de Jérusalem, en 1120.

41 .33- Croix de Souloumiac. Cette croix de 1676, éloignée de la route et du carrefour actuels, se trouvait plus proche du croisement antique, entre les voies de, Capestang vers les Fargoussières et Cahors, (dont il est écrit qu’elle était une voie romaine de secon degré) et celle de, Béziers-Puisserguier-Quarante-Bize, empruntée par les mouvements de troupes du Moyen-Âge. Il y avait, dit-on, à proximité de ce croisement, une chapelle ruinée côtoyant une bergerie détruite dans les années quatre vingt. Celle-ci est toujours mentionnée sur la carte IGN 2545.0 de 1989, mais ne l’était pas encore sur la carte de Cassini, ce qui indique que cette ferme n’étaient pas construite au 18e . La chapelle voisine, disparue lors de l’aménagement du carrefour, affirme-t-on, n’apparaît ni sur les nouvelles cartes, ni sur les anciennes cartes de 1704 du diocèse de Narbonne. Cette absence met en doute l’affirmation qu’elle ait pu exister. Dans son livre " Le Biterrois-Narbonnais ," l’abbé Giry écrit, qu’à Souloumiac il y a la trace d’une importante " villa " et qu’une nécropole du Haut-Moyen-Âge succéda à cette dernière. (Gallia 1975, p. 509. Fédération Archéologique de l’Hérault 1987, p. 135.) Cette croix de carrefour, en acier forgé, garnie de volutes à sa croisée et de pointe de flèche à l’extrémité de ses bras, est enfichée dans le trou d’arbre d’une meule servant de socle. La jante de celle-ci est gravée d’un texte, en caractères de la langue romane, qui invite le voyageur ou pèlerin à le méditer depuis 1676 ( voir ci-dessous ).

J. C.

C H R ET I E N P E N S E Q U’I L F A U T M O U R I ~ ET D E L A M O RT T E S O UV E N I ~ 1 6 7 6 La date de 1676 est la même que sur les deux croix de Rouèïre. On peut regretter que cette stèle soit à l’écart de la chaussée et qu’il faille, de surcroît, franchir un fossé pour discerner le contenu du texte, pas exactement traduit sur la plaque blanche. (Les fautes du texte sont dues au langage local de cette époque ou à une fantaisie littérale. ) Nota :Certains documents portent la date de 1664 au lieu de 1676.

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34- Croix de Couquette. Etymologie : vient du nom Coquille. En Oc. Coquilla.(ALF322.Nissan-les-Ensérune). Ce nom serait cité depuis l’an 798. Cette croix se trouvait à la ferme ruinée de Couquette, sur le versant sud des garrigues blanches, anciennes lignes de rivages. " En 1005 Ermengaud, archevêque de Narbonne, par testament, lègue l’alleu (propriété) de Couquette à l’abbaye de Quarante". Il devint la propriété du chapitre et de son abbé, tout comme l’étaient "Rouèire", la "grange basse", la " grange haute " et les écarts. Comme pour rappeler la croix pattée de l’ordre des chevaliers de St-Jean ou celui des hospitaliers, cette croix, aux bras verticaux évasés, reçoit un triangle pointe en bas. Serait-ce le symbole représentatif, du sacrifice du Golgotha (celui du Christ) ,ou celui des chevaliers croisés? Le bras supérieur reçoit un triangle sculpté suspendant une petite croix inclinée sur la droite, comme pour symboliser la tête du christ en croix*. Cette croix porte la même date gravée de 1589, que celle de l’écusson de la ferme "grange haute" ( p.57) et se trouve actuellement chez Marie-Claire Chappert à Quarantette. Nota : Certains documents portent la date de 1587. * Il y a une similitude entre cette croix et d’autres du même genre, notamment dans l’église ruinée des bénédictins de l’église S t-Jean-du-Gard datées du XIIèmeS. Ces dernières, sculptées sur un probable fût d’ancienne croix, sont remarquables par la présence de deux petites croix Templières qui suspendent : l’une, un cœur dans un sens (comme ci-contre) et l’autre, un cœur dans le sens inversé (tenu à la croix par la pointe du cœur).

35- Croix de Saint-Jean de Conques . Etymologie : Conques : lat. " Concham " au sens de baie sur le coté ou de vallon, bas fond, dérivé : de CONCA + suffi. ETA ; petit vallon. Comme c’est décrit précédemment, ce lieu a porté les noms de Ste Foy, ou Gravas. Il porte encore celui de St-Jean le bas ou de Conques, mais plus familier est "grange basse." On rappelle que, d’après le dictionnaire Larousse, ce nom peut également signifier grande coquille concave. Dans le tènement proche des bâtiments actuels de ce lieu, des sépultures à Lauzes furent mises à jour. Le propriétaire actuel, Mr Boussagole, révèle:- "j’ai endommagé un des pneus du tracteur sur un mur d’une quinzaine de mètres de longueur, enfoui à quatre mètres de distance derrière cette croix et parallèle au chemin. " Il ne prétend pas soupçonner le mur d’une chapelle ruinée comme le rapportent certains. Pourtant une chapelle existait

43 probablement dans ce lieu, attendu qu’il y en a une de citée dans le rapport de visite de Mr. Corsier en 1404 . La croix en fonte, portée par un haut piédestal calcaire, marquerait l’emplacement de cette supposée et ancienne chapelle. Celui-ci reçoit l’inscription ci-après :

O. CRUX. AVE. 1876. Salut, ô croix 1876.

36- Croix de Pech Menel. Cette croix, à la représentation allégorique, est de belle facture artistique. En fonte, elle est l’œuvre d’un artiste accompli, celle d’un compagnon fondeur averti. On observe les instruments de la Passion: les clous, la couronne d’épines, le marteau, le fouet, la tenaille et la bourse, n’ont pas ici la vocation de représenter des outils de forgeron, comme mentionné dans un document. On remarque aussi la présence d’un mouton. Il est écrit : " que ce dernier peut être la représentation symbolique du Christ, mais aussi celle de St-Jean-Baptiste souvent représenté avec un agneau symbolique qui est invoqué pour la santé des troupeaux surtout les moutons, et par extension, il est le patron des laboureurs et des vignerons."

Voilà pour autant, une explication qui corrobore avec le lieu dans lequel cette croix fut dressée. On trouve aussi cette même croix sur la place de l’église de Colombière-sur-Orb (Hérault).

37- Croix du cimetière des Huyères -Uyères. Etymologie : oc. Oliera (huilier). Latin : Lasuguéüs " Locus Versar Cillis 1249 ". Ce cimetière se trouve à proximité de la ferme ou bastide ruiné du13èS. qui semble avoir reçu des murs de défense. Les silos, encore visibles dans le sol, recevaient les stockes de grains ou d’autres denrées. Ce lieu était une des possessions du chapitre et abbé Quarantais. Cité en 1249, dans la liste des biens d’une bulle du Pape Innocent IV.,il a probablement été habité par des St-Jean-Hospitaliers, comme ont pu l’être les autres possessions locales des St -Jean du lieu. Le blason, ornant le portail d’entrée, aurait sans doute apporté une réponse à nos suppositions s’il n’avait pas disparu. La banale croix métallique du petit cimetière privé voisin (famille Tarborièch des Pradels), a été dérobée en 2001. Elle fut rétablie par une petite croix en bois, tout aussi banale, en juin 2011. Cette bastide a portée les noms de Las Uguiers ou Uyères.

44 Ci– après, quelques détails de cette ferme fortifiée noyée dans la végétation dévorante.

Murs de l’édifice.

Ouvertures Défensives.

Silo: Embouchure extérieure.

Silo: Vue intérieure du cône d’entrée.

38- Croix des " Arabe". Au sujet de cette croix contemporaine et du lieu de son implantation, il n’y a pas de fait d’armes historiques rapportés par documents qui conduisent à les attribuer : -à celui d’une escarmouche moyenâgeuse en ce lieu, -à celui d’un prétendu roi Sarrasin ayant combattu contre Charlemagnes en ce lieu, -et à la date de 1831 inscrite sur sa colonnette calcaire carrée, dont on ne sait à quel fait local historique la rattacher, -pour écrire que les récits qui lui sont rapportés sont vrais ! Les récits légendaires ont toujours ravi les peuples et faisaient parfois parti des compositions des troubadours. La seule observation qu’on puisse émettre sur cette croix dite" des arabes " est qu’elle se situe sur un ancien chemin, dont la chaussée encore proprement empierrée à proximité

45 de la bastide des Uyères, montait pratiquement en droite ligne du village de Quarante à cette croix et même au-delà. Remarquons que ce chemin aurait longé, sur sa partie basse, un ruisseau désigné sous le nom de "ruisseau des Maures". Devrait-on voir en ce nom " Maure " une possible relation avec les anciens Chevaliers fermiers des Uyères dépendants de l’abbé de Quarante, combattant les infidèles d’Orient sous les ordres de leur archevêque Maurin qui aurait pu les enrôler? Lui qui blasonnait d’azur au croissant renversé témoin de son engagement de croisé. D’ailleurs son nom, répandu au Moyen-Âge aux conquérants arabes du Maghreb et de l’Espagne, veut dire "MAURE," dont les armes et l’étendard de l’Empire Turc sont le croissant. Ce chemin, souvent emprunté par ces fermiers, à pu conserver le souvenir de leurs combats contre les Maures.! Cette croix aurait-elle eut un rapport avec les ex-voto gravées sur la stèle de la croix de Juillet, à deux cent cinquante mètres au nord-est de celle-ci? .

39- Croix de Juillet ou Juliette. Cette stèle érigée à 197m d’altitude, sur l’un des plateaux les plus élevés du territoire nord quarantais, surplombe vallons et plaines du sud Biterrois et nord du Narbonnais. C’est probablement de ce point particulier que provient l’écrit suivant : "... Quarante.: paroisse du bas Languedoc, sur une montagne, à quatre lieues du couchant de Béziers et à cinq ou six au septentrion de Narbonne …...on voit du haut de la montagne, les villes de Narbonne, de Béziers et l’abbaye de Quarante." Cette phrase antérieure à 1771, donne le dicton suivant : " que de cette montagne on voit Quarante et deux villes. " Celui-ci interpelle par les relations topographiques qu’établissent entre eux les lieux désignés: -Croix de Juillet Béziers - Narbonne puis l’abbaye de Quarante. ( Voir pages 60-61.) Par ailleurs, on remarque sur l’ensemble calcaire, "mâture /piédestal ", une profusion de croix gravées de formes différentes, ayant une similitude incontestable avec celles des Chevaliers Hospitaliers, soldats du christ ! Si on admet que le nom de cette croix provienne des processions faites en Juillet vers cette dernière, d’autres suppositions peuvent être avancées comme celle du souvenir de "la suppression de tous les ordres de chevalerie, le 30 Juillet 1791" car on ne peut pas ignorer la présence de certains membres de ces ordres en territoire quarantais. Mais alors qui aurait gravé ces ex-voto,d’une autre époque, de la croix ci-dessus? (voir l’étude de leur forme pour s’en convaincre p.64-65)

46 Mais aussi, ces ex-voto semblent être les empreintes des chevaliers croisés qui vinrent graver, en ce possible mois anniversaire, leurs souvenirs de batailles. En effet, on est frappés par la fréquente présence du mois de Juillet dans le déroulement des combats avec les impies du christ en extrême Orient. Les: 20 Juil. 1186 ; 2-3-4-6-Juil. 1187; 14 Juil. 1189; 12 Juil. 1191; Juil.1121, signent des faits de prises ou pertes de terre Sainte aux infidèles, dans des luttes aux lourds tributs, qui amenèrent petit à petit au déclin des croisades. Le 22 Juil. 1266 l’un des derniers bastions des croisés, le château-fort Templier de Safed, tomba aux mains des infidèles. C’est la décadence des croisades ,la fin d’une épopée. Ainsi, ce nom de Juillet qui sonne comme une défaite aurait-il pu devenir pour ces soldats du Christ, un témoin symbolique de leur engagement et désillusion ?

40-41- Croix des Fargoussières.

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40-41- Croix des fargoussières. Fargoussières: Etymologie: en oc. Farga, signifie: forge; en latin (Fabricant). D’ailleurs si on observe de prés les gravures d’une des croix du lieu, on peu remarquer sur un coté du socle une enclume et sur l’autre un pilon (page49). L’abbé Giry donne le nom de boue. .. Le nom peut être lié, avec réserves, à Farguièra qui en oc. signifie fougère….. La stèle d’entrée sud, composée d’un piédestal calcaire à deux tables biseautées en grès, reçu des inscriptions sans traduction possible sur ses quatre faces et un tronc de colonne gallo-romaine surmontée d’ une croix en fonte contemporaine. Cette stèle, fut déplacée le 11 Juillet 1941, par V. Aguillard, dans l’actuel propriété de la famille Jean Hégé, pour la gêne qu’elle occasionnait en bordure de chaussée. Forgeurs . " La plupart des forgeurs à la catalane, fargaîres, présents dans les forges d’Espagne, d’Andorre et de France, sont originaires de trois cantons de l’Ariège: Les Cabannes, Tarascon et Vicdessos. Paysans-ouvriers, les forgeurs conservent leur savoir-faire, gage de leur monopole d’embauche, dans leur famille. L’apprentissage, long, ne commence pas avant dix-huit ans car le métier exige de la force physique. Jaloux de leur secret, ils supportent mal une présence étrangère, ce qui explique les relations difficiles avec les ingénieurs. L’équipe se compose de huit forgeurs : quatre maîtres, le foyer, le chef qui n’accepte de travailler que dans un feu qu’il a lui-même construit à son punt, à ses mesures . Le maille qui s’occupe du marteau et les deux escolas qui dirigent la réduction du minerai. Chacun d‘eux est aidé par un valet, les pique-mines , et les miaillous. Ils se divisent en deux brigades lors de la réduction, ne se retrouvant tous qu’au moment de sortir le massé du feu. Le travail, douze à quatorze heures de jour comme de nuit, est dur, dangereux, avec la menace de refroidissement dramatique. Les forgeurs sont bien nourris ( pain blanc: le pa de la fargade, viande et vin du Roussillon) et mal logés sur la paille du crambot. Rémunérés à la tâche, ils touchent une prime, la fargade, lorsque la production de la semaine atteint cent quintaux. Ils font figure de notables dans la communauté villageoise. Quand les forges à la catalane s’arrêtent, les forgeurs redevinrent paysans, d’autres rejoignirent les martinets et les usines métallurgiques. Certains, mettant à profit leur connaissances du feu, se tournèrent vers les verreries de Bordeaux ou Carmaux et vers les chemins de fer." (Texte d’André Levy. Dictionnaire des Pyrénées. Ed. Privat).

En fait, le nom de "Fargoussières" pourrait provenir du nom " forge." La forge locale, dont il ne reste que le nom de la rue, aurait pu servir de station pour préparer les montures ou attelages cheminant sur cette voie, antique dit-on, pour se rendre vers Cahors. Ci-contre, minerai du Rougiéras de Quarante . Les habitants de ce hameau, sur ce passage obligé pour la montagne…. ( malgré qu’il ne soit pas mentionné sur la carte de 1704 du diocèse de Narbonne), auraient eu la faculté d’exploiter du minerai de fer des terres ferrugineuses du Rougiéras quarantais, en petite quantité soit, mais aussi de s’en faire acheminer des mines du minervois, par le chemin " Cami-ferrat " passant de Cruzy à Quarante, via St Privat .

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40- Croix d’entrée sud des Fargoussières.

Pas de traduction possible des inscriptions de ces stèles

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Salut ô croix notre unique espérance

41- Croix d’entrée nord des Fargoussières.

Salut ô croix notre unique espérance

Gloire à Dieu dans les cieux

Peut être un cubilot de fusion avec les flammes et fumées qui sortent et dessous une enclume de forgeron.

Je vous salue Marie

Peut être un martinet de forgeron

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42- Croix des quatre chemins. Cette croix, érigée par la famille Niel Julien, en 1972 ou 1975 à la croisée de quatre chemins sur le versant nord du pech - Laurier, n’a pas d’histoire religieuse particulière. Elle est la promesse d’être dressée, par le père de Julien, envers la propriétaire du terrain, si celui-ci en acquérait la propriété. Il a acquit la parcelle et dressé la croix Elle est remarquablement assise sur un rocher calcaire isolé qui lui assure un maintien sans faille. Cette croix métallique, au style classique et profil enhendé s’inscrit dans la logique d’une dérive de la croix occitane.

43- Croix Mimard des Poulviès. Dressée aux Poulviès par la famille Mimard de Cruzy et bénit, le 7 février 1993 par le Père Frioux curé de la paroisse, cette croix n’a pas fait l’objet de récit particulier. Néanmoins, le soin et l’application apportée à sa confection et son ancrage, entre deux socles de foudre, lui donnent une allure révérencieuse. L ‘embase, de forme triangulaire, fait penser au symbole trinitaire ou au mont Golgotha.

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44- Croix de Font -Bonne. Cette croix récemment signalée, est dans la propriété de la famille Niel à Font-Bonne. Située dans le jardin clos de la dernière maison du village sur la route de Pigasse, elle fait partie des croix exceptionnelles de Quarante. Dressée par les chanoines de l’abbaye dans leur potager, sans doute, bien avant que la révolution saisisse leurs biens et ceux de la noblesse, elle est de forme latine, austère, sobre et robuste composée d’éléments en granite scellés dans une dalle de pierre de grandes dimensions. L ensemble repose sur une assise de trois rangées de blocs calcaire, autrefois protégé par une pergola qui s’ est dégradée au fil du temps. Cette croix, dépourvue de toute inscription et modelé, ne nous renseigne pas sur son passé. Les photos ci-contre indiquent, cependant, que ce lieu, où coulait une source abondante la Font-Bonne, permettait aux villageois d’y tirer de l’eau au retour de leur labeur et aux chanoines de la stocker dans un bassin aménagé. Bénéficiant des acquis du passé, les populations locales et les chanoines en particulier, ont su mettre à profit la source conjointement au bâtiment existant. Elle alimentait un bassin-lavoir sur les bords duquel trois margelles de pierre en pentes, intercalées de cavités carrées peu profondes recevant le savon, permettaient aux chanoines de laver leur linge. Perpétuellement renouvelée, l’eau s’évacuait par un trop plein dans un déversoir-cuvette en pierre (ci-dessous). Celui-ci la libérait dans un petit canal d’irrigation du potager avant d’alimenter les fermes de Rusquier et de l’Asparet suivant la pentes naturelles du terrain. La présence de mosaïques, remarquées lors de travaux de terrassement, révélèrent le probable emplacement d’une villa romaine. Margelles et leurs cavités porte-savon.

Lavoir ancien modifié

A fin de compléter la description du lieu de Font-Bonne, on observe ici le monumental escalier entre le logis et le potager des chanoines. Le mortier ci-contre, probable ustensile des chanoines, a vu son pilon en bois disparaître il y a quelques années.

Déversoir-cuvette.

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Annexe.

Photo: Claude Bertrand

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A QUARANTE. 1- L’histoire de Saint-Jean-Baptiste dans le village de Quarante. Pour comprendre son histoire en ce lieu, il faut revenir aux origines du christianisme. Qui est Jean-Baptiste? C’est le fils d’Elisabeth et de Zacharie. Sa mère demanda qu’on l’appela Jean, prénom qui fut confirmé par écrit sur une tablette par son père, prêtre. En ce début du 1er Siècle se dessine un réveil religieux qui correspond à l’attente populaire d’un changement par le baptême. C’est dans ce mouvement baptiste qu’émergent deux groupes, l’un autour de Jean-Baptiste et l’autre autour de Jésus. Jean était fils de prêtre et part au désert, contestant le sacerdoce de Jérusalem, celui de Jésus. Là-bas, il revêt le vêtement de peau de chameau (représenté par de la peau de mouton sur le chef reliquaire de S t-Jean-Baptiste à Quarante) et répond à la vocation de prophète. S’il prêchait aujourd’hui, il réclamerait : le partage avec les démunis, l’honnêteté professionnelle et le respect d’autrui sans distinction de catégorie socioreligieuse, de races, etc.…(Ramené à cette époque, avec des termes différents le fond n’aurait pas changé de sens). Les évangiles ont donc mis en relief les différences entre le message de Jean-Baptiste et celui de Jésus son cousin, en donnant à chacun d’eux, son originalité.

2- Condamnation de St-Jean-Baptiste par Hérode. " Après avoir reproché son inconduite au roi Hérode Antipas, qui avait pris pour femme sa propre nièce et belle sœur Hérodiade, Jean-Baptiste fut jeté en prison. Le tétrarque (gouverneur romain) de Galilée, craignant peut-être des troubles, avait fait enfermer Jean à Marcheront. " Puis vint sa décollation. C’est au cours d’un festin, séduit par la danse de Salomé, fille d’Hérodiade, qu’Hérode lui promit de lui accorder ce qu’elle voudrait et la jeune fille, à l’instigation de sa mère, lui répondit "donne-moi ici, sur un plat, la tête de Jean-Baptiste!" Le roi atterré fit décapiter le prophète. Sa tête fut apportée sur un plat et donnée à la jeune fille qui l’apporta à sa mère. Hérode plus tard, croira que Jésus n’est autre que Jean-Baptiste ressuscité ." Jean-Baptiste, dit "le Précurseur," peut être considéré comme une personnalité charnière dans l’histoire religieuse du monde Juif au 1er siècle de notre ère. Il fut, en un sens, initiateur du mouvement, tout en ne laissant pas de traditions consistantes et rapidement absorbées par le christianisme. Il ne nous est connu que par des textes chrétiens ou juifs (judaïques) particulièrement une notice de Flavius Josèphe " dans les antiquités judaïques," puis plus proche de nous, ici même à Quarante, par son chef reliquaire l’exceptionnelle œuvre de Jacques Morel de l’année 1443. Ci-après, document extrait de " Histoire des saints et de la sainteté chrétienne. " (Ed .Hachette, livre 1 p.203 ).

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3– Le culte populaire de Saint-Jean-Baptiste . Après la décollation, son corps aurait été enterré à Sébaste en Samarie. Sa tête, portée à Hérodiade sur le célèbre plat de Salomé, dut encore subir les outrages de cette femme vindicative. Selon certains, elle lui aurait transpercé le front avec un couteau; selon d’autres,c’est la langue qui l’avait outragée qu’elle perça à plusieurs reprises de sa longue épingles à cheveux en or. Pour empêcher toute résurrection, ou simplement tout culte, de Jean-Baptiste, Hérodiade fit ensevelir cette tête dans un lieu secret de son palais. Mais après sa mort, une révélation fit découvrir la relique qui fut alors réunie au corps à Sébaste. Sous l’empereur Julien l’Apostat en 362, les païens profanèrent la tombe et brûlèrent les restes de JeanBaptiste et, pour que l’outrage fût complet, y mêlèrent des ossements d’animaux! Les cendres furent ensuite dispersées. Cela n’empêcha pas cependant une grande diffusion ultérieure des reliques de Jean-Baptiste; les plus fréquemment attestées sont sa tête et des doigts. La tête qui a le mieux défendu ses prétentions à l’authenticité, est vénérée en la cathédrale d’Amiens et «son chef reliquaire en argent et vermeil, à Quarante.» Elle porte au front le trou qui serait la trace du couteau d’Hérodiade, mais on en a présenté d’autres à Soissons à la Sainte Chapelle de Paris, à Lyon, à Toulouse,à l’Escurial,à Moscou.Quant aux doigts, il s’agit presque toujours de l’index droit, celui qui désigna" l’Agneau de Dieu.» On a vénéré simultanément cet index à la Sainte-Chapelle, à Florence, à Lyon, à Toulouse, à Besançon, à Saintines dans l’Oise et surtout à SaintJean-du-Doigt près de Morlaix, où le culte se poursuit encore de nos jours et donne lieu à l’un des plus célèbres pardons de la Bretagne. A Saint-Jean-deMaurienne, trois doigts de la main gauche, ceux qui ont baptisé Jésus, sont conservés pieusement. Mais on trouva une main et un bras entiers aux Jacobins de Perpignan (qui prétendent aussi posséder des cheveux du saint!), à Soissons et à Rome. On vient en pèlerinage à Amiens et à «Quarante» pour être guéri des vertiges et surtout l’épilepsie, couramment

appelé "mal de Saint-Jean." A Saint-Jean-du-Doigt, plusieurs fois par an et en particulier à l’occasion du pardon (le 24 juin), le doigt qui a indiqué "la lumière du monde " est trempé dans l’eau de la fontaine qui en tire ses vertus miraculeuses contre les maux des yeux. Jean-Baptiste est le patron des fabricants de chandelle; il est aussi celui des arbalétriers, probablement à cause de la blessure à son front, et, en souvenir de sa langue percée, de tous les métiers qui se servent d’un poinçon: tailleurs, selliers, bourreliers et maréchaux-ferrants. Il est le patron des couteliers et fourbisseurs, à cause de la hache de sa décollation et, pour avoir été vêtu de poil de chameau, des pelletiers et corroyeurs. Souvent représenté avec l’agneau symbolique, il est invoqué pour la santé des troupeaux, surtout des moutons et, par extension, il est patron des laboureurs et des vignerons. En Italie et en Espagne, il protège les femmes enceintes ou en couches. Dans la Vienne, il est invoqué contre la peur en raison de son courage devant Hérode. A Châlons-sur-Marne, la veille de la Saint-Jean, avait lieu jusqu’au siècle dernier une cérémonie appelée la Procession verte: le chapitre de la cathédrale allait en procession à une demi-lieue de la ville ; les chanoines eux-mêmes suivis de tout le clergé et d’une part de la population coupaient avec des serpes des branches d’arbres qu’ils rapportaient solennellement afin d’orner les églises pour la fête du saint. Mais la cérémonie la plus spectaculaire, hors les feux de la Saint-Jean dont il est question ailleurs, est la procession de la " lunade " à Tulle. Au moment de la grande peste de 1348, un ange apparut à un religieux de la confrérie de Saint-Léger pour lui ordonner de promener autour de la cité la statue de Saint-Jean qui se trouvait dans la cathédrale. Cette procession, suivie par les habitants de la ville, pieds nus et un cierge à la main, arrêta la peste. Depuis, on refait chaque année, le 23 juin, le même parcours. La procession commence à sept heures du soir et dure trois heures. Elle part de la chapelle de Saint-Jean dans la cathédrale et parcourt les plateaux qui entourent Tulle à l’est en faisant station dans sept oratoires ou chapelles sur le chemin; elle revient enfin à la cathédrale après avoir décrit un demi-cercle autour de la ville (d’où probablement son nom de lunade). Une description du XVIIe siècle montre les membres des confréries portant des cierges garnis de verdure, suivis des femmes couronnées de cire et de fleurs; la procession, qui se faisait pieds nus, était accompagnée de musiques, de pétarades et de feux d’artifice. Actuellement encore, elle doit être suivie un cierge et une branche verte à la main ,

55 (ce rameau protègera des fièvres) et le parcours est jalonné de grands feux de joie. Cette procession fut à plusieurs reprises interdite; elle se limita à la cathédrale pendant plusieurs années au moment des lois de séparation, mais pendant la Révolution au contraire ou l’occupation nazie, la statue fut promenée clandestinement, cachée par une couverture, sur une charrette à bras. Si la cathédrale d’Amiens détient le chef du Précurseur enchâssé dans un plat de vermeil, il n’est pas moins vrai, que l’abbatiale Sainte-Marie de Quarante (Hérault) dans l’anonymat le plus complet, possède l’une des plus belles pièces d’orfèvrerie du chef reliquaire de Saint-Jean-Baptiste depuis 1443. Œuvre magistrale de Jacques MOREL ci-dessous. Photo de H.Josse -Bas relief cath. D’Amiens

Photos: J. Coupat .Trésor de l’abbatiale Sainte-Marie de QUARANTE. Chef reliquaire du Précurseur.

4-Jean-Baptiste, patron de la paroisse et de la grande foire du 29 Août. "Les chanoines, souvent confondus avec les moines, constituent une catégorie particulière parmi les différents ordres du clergé séculier, c’est-à-dire vivant dans le monde profane proprement dit. Ils constituent généralement, sous la Règle de Saint-Augustin, un chapitre cathédral, car associé à la vie d’un diocèse autour de l’évêque ou de l’archevêque qui en a la charge ". C’est ainsi qu’à Quarante, il y eut une abbaye d’hommes qui embrassèrent la règle de St. Augustin, au XIème Siècle. La vie de St. Augustin a été de près, celle qu’a vécu dans le désert, S t-Jean-Baptiste.

56 Or, le "désert," particulièrement cher aux moines, les conduisent à considérer Elie avec Jean-Baptiste, comme le modèle de vie monastique et de la recherche de Dieu, dans la contemplation. Est-ce pour cela, entre-autres, que le 14 des calendes de novembre 1053, Guidfred, primat de Narbonne accompagné des évêques de Béziers et d’Agde et d’autres, fit la dédicace de l’église de Quarante en l’honneur de la Sainte-Vierge, des Saints-Martyrs de Quarante, de la Sainte-Croix et de Saint-Jean-Baptiste ? " Il y a donc 956 ans que la dévotion à Saint-Jean-Baptiste est à l’honneur dans cette paroisse " a écrit Louis Vabre. Avant 1404 et surtout après, à partir de 1443, date à laquelle fut exécuté le buste reliquaire du Précurseur, de toute part de nombreux pèlerins vinrent le vénérer et lui demander certaines guérisons, en particulier celles des maladies de la tête. Cette affluence a donné lieu à l’existence d’une confrérie de pénitents blancs et à l’édification de leur chapelle St.-Jean à Paracolh, puis de la foire du 29 août de chaque année, (reportée au 19 août pour raison de vendanges précoces) qui attirait de sept à huit mille pèlerins. Ce n’est sans doute qu’au XVème S. que la confrérie des pénitents blancs de Quarante s’est développée comme ailleurs à cette époque . Plusieurs documents, aptes à établir les étapes de cette dévotion, font partie de l’histoire de Quarante. Deux parchemins, archivés à Narbonne, rapportent que " les chevaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem possédaient, proche des territoires de Quarante, deux propriétés ." - La première propriété était bornée " Recco de Conqettas " qui donna le nom de " Conques." ( grande coquille concave. Définition Larousse ). Cette coquille symbolique se retrouve dans d’autres édifices appartenant aux chanoines du lieux . Cette propriété, dans laquelle aurait été dressée une chapelle aujourd’hui disparue, a reçu une croix pour en marquer l’éventuel emplacement en 1876. Les coutumes veulent que ce lieu s’appelle " St-Jean de Conques," mais aussi " grange basse." Il fut aussi appelé du nom de " Ste-Foy " jusqu’en 1791. On peut voir dans ce dernier nom celui qu’aurait pu porter la chapelle consacrée à cette Sainte. Cette grange fut voisine d’autres granges, situées en légère hauteur au couchant, appelées " grange haute, Couquette," ou encore "le Pigeonnier, le Rougiéras et les Uyérs." Il semble qu’ils furent aussi la propriété des hospitaliers et des chanoines pour y avoir, très récemment trouvé inscrite, sur la clef de voûte du portail de l’un de ses bâtiments, l’une des plus anciennes dates du territoire quarantais, contenue dans un écusson gravé de la date 1589. Voisine aussi, sur la clef de voûte d’un autre portail du même bâtiment, une coquille du type " St-Jacques, concave inversée " comme celles sculptées sur les piliers de la nef de l’église de Quarante, symbolisant le baptême en St-Jean. Elle surmonte un panier, de forme qui rappelle celle d’une hotte en osier, dont se servaient les vendangeurs du Moyen-Âge, comme pour vouloir rappeler "qu’ ici, on engrangeait." (En général, ces granges étaient le lieu de travail du personnel agricole, convers d’abbayes notamment.) On remarque que les inscriptions sont contenues dans un écusson d’Azur. (p. 57) Le nom supérieur lisible est : Les lettres incertaines du dessous seraient : La date:

AFRAIS s e.. .x 1589

..

.

ou

S t .x . . .

57

Coquille Ecusson J.C.

Vers l’année 1848, "la grange haute" appartenait à Mr Mouret. A la même époque, la " grange basse " voisine de la précédente, appartenait à Mr.Massot. -L’autre propriété, plus grande et située au sud de St-Jean de Conques, était Saint-Jean de Rouèïre ou Rouèïre signalée par deux croix. Quoique datées de 1676, ces croix de mission et de procession semblent rappeler l’emplacement probable de chapelles disparues ou d’un ancien hospice des chevaliers hospitaliers de St-Jean-de-Jérusalem, de la période des grandes épidémies et de guerre.

5- Quels sont les documents qui confirment l’existence du culte de St-Jean-Baptiste en territoire quarantais : -Le premier sont les dons que fit Guillaume Aribert, le 14 des calendres de décembre 1037, "en se faisant chanoine à l’abbaye de Quarante." Il donne deux setiers de blé aux chevaliers de Saint Jean-de-Jérusalem (1) puis idem à l’hôpital de Jérusalem(1)." sans doute Rouïere qui, à cette date, était la propriété de la collégiale de Capestang. Le deuxième est celui de la consécration de l’église actuelle avec le petit autel de Saint-Jean-Baptiste entre autres, en 1035 ou 1053. -Le troisième est l’échange qui eut lieu en 1262, entre les chanoines de la collégiale de Capestang et ceux de l’abbatiale et leur abbé Bérard de Quarante, et de citer : "L’abbé de Quarante, Bérard et dix de ses chanoines, font échange de leur possession située en territoire de Capestang, limitrophe de Quarante, avec ce que possèdent les religieux de ce bourg capestanais: frère Raymond Guillaume, précepteur de l’hôpital de S t-Jean de Capestang, Pierre Imbert sous précepteur et Guillaume Pons précepteur de l’hôpital de St-Jean de Rouèïre, ainsi qu’au territoire de St-Jean de Conques le confrontant (Voisin)." (Pour comprendre ces échanges, il est conseillé de lire "Les Templiers" de Patrick Huchet Ed. Ouest-France.)

Ces possessions capestanaises, " auraient été échangées contre un moulin des abbés de Quarante, situé entre le village de Montels et celui d’Aubian, sur le cours de la Nazoure " avance Mr Boussagole de grange-basse et dé préciser " qu’il y a des écrits. "

58 Ainsi, ces deux grands lots de terrains et bâtis, devinrent la propriété du chapitre de Quarante et de son abbé, confirmée par le prieur frère Faraud Bonacio de l’hôpital de St.-Jean-de-Jérusalem de St-Gilles, le 21 mars 1262 (ou 12 des Calendes d’Avril.) (1) Dans les documents des templiers du pays Audois, on lit aussi un acte, antérieur à la date de création de l’ordre du Temple. Cet acte est relatif à l’œuvre de S t-Jean-Baptiste de KARREIRA. Il s’agit d’une donation effectuée en mars 1113, destinée au prieur et ses clercs, antérieur à la date officielle de la formation de l’ordre des templiers. Que ce soit le don d’Aribert de Quarante, fait aux chevaliers et à l’hospice de S t-Jean-de-Jérusalem ou celui de St-Jean de Karreira, on constate qu’ils sont tous deux antérieurs à la naissance de l’ordre des Templiers en 1119, et celui de St- de -Jérusalem en 1120. L’ordre du Temple est un ordre marial et Marie tient une place primordiale dans le cœur, la foi et la piété du chevalier. Dès 1099 fut créé l’ordre des Chevaliers Hospitaliers de St-Jean. ci –dessous domaine de Roueïre, le probable hospice de l’ordre de St-Jean-des-Hospitaliers.

Photo J. Coupat

-Le quatrième témoignage, nous apprend que Mr Corsier, l’envoyé de l’archevêque et primat de la Gaule Narbonnaise, en visite le 23 août 1404 à Quarante, vit dans cette paroisse une confrérie érigée en l’honneur de la Décollation de Saint-Jean-Baptiste; ce qui semble qu’il existait probablement une chapelle dédiée au précurseur. -Le cinquième témoignage , pas le moindre, est la présence dans l’abbatiale du buste reliquaire de Saint-Jean-Baptiste et des coquilles baptismales sculptées sur les piliers.

6- Mais de quelle chapelle locale était-il question dans le rapport de 1404 ? -Celle de St-Jean du bourg ( inexistante à cette date pense-t-on) ? -Celle de la parcelle St-Jean de Cruzy, (en face de la croix Callé de St Privat) "St- Jean " sur la carte I.G.N. 2545, sous l’indication " église ruinée? " -Celle de St-Jean de Parazol (Paracolh), ravagée en 1569 par le seigneur de St. Coûat et sa troupe? (qui n’est pas ouvertement citée dans le rapport de visite de 1404). -Ou, celle de St-Jean de Conques ? Le rapport de visite de 1404 fait état de quatre chapellenies : Saliès, Sériège, St. Martin et St-Jean de Conques. Pour ne pas avoir été citée, ni en 1249 dans la bulle d’Innocent IV des églises soumises à l’abbé, ni dans le rapport de visite de 1404, cela confirme que la chapelle de Paracolh aurait été édifiée peu de temps après 1404, probablement en l’honneur du reliquaire de St-Jean-Baptiste de 1443 et de sa confrérie .

59 Doit-on voir, en St-Jean de Conques, la chapelle dans laquelle se célébrait la cérémonie de la Décollation de St-Jean-Baptiste ?... Il est fort peu probable, puisqu’un texte nous renseigne sur la chapelle de St-Jean de " Paracolh ", comme étant celle des processions de cette confrérie. Ravagée par le seigneur de St Couat, elle fut remplacée en 1576 par l’église St Pierre en Quarante. Le texte suivant nous confirme cette version : " le 28 août de l’an 1550, veille de la commémoration du martyre de St-Jean-Baptiste, la capsa de l’image de monsieur St-Jehan de Paracolh, précisément conservée à l’abbaye de Quarante, fut portée en procession par la camararie du lieu jusqu’à l’église consacrée à St-Jehan de Paracolh puis ramenée à l’abbaye comme il était de coutume." Il est rapporté dans un autre document de 1576 " que cette église était en un lieu distant et champêtre de Quarante et hors ses murs et qu’elle dépendait de la confrérie de la Décollation dont le camérier était patron et maître ." Ainsi, selon le texte ci-dessus, la préférence va tout naturellement à cette chapelle de Saint-Jean de Paracolh, qu’il faut retenir comme votive de la fête du Saint-Patron du bourg de Quarante et de la foire annuelle du 29 août de chaque année. Carte Michelin N° 2545. 1/25000è.

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7- Croix de Juillet. En page 45, il est précisé que cette croix occupait une position remarquable. Elle a reçu, en outre, de multiples petites croix gravées festonnant le piédestal et sa colonne sur laquelle fut fixée, dans le passé, une rose-croix en pierre calcaire rougeâtre. -Sa situation géographique. D’après le dicton porté dans un dictionnaire de 1771, la croix de Juillet serait la seule référence topographique retenue, d’où l’on pouvait voir dans le lointain, les masses des édifices imposants des cathédrales et abbatiale , de Béziers, Narbonne et Quarante. - Observations topographiques: -la distance géodésique de cette croix à la cathédrale de Béziers est de 19.9km. -la distance géodésique de cette même croix à la cathédrale de Narbonne est de 20.4 km. (Ces relevés opérés sur la carte IGN 65- TOP- 100 peuvent avoir une probable imprécision).

De la croix de Juillet, la cathédrale de Béziers se situe aux environs de 12° est /sud-est. Sa direction confondue avec l’axe d’une dépression de terrain, appelée " traverse de cresse ", conduit le regard du pèlerin vers ROME. (Photos J. Coupat ci-dessous). La relation ci-dessus peut nous paraît fortuite aujourd’hui, mais elle fait de cette observation un cas particulier pour l’époque reculée de la fréquentation de cette croix et semble confirmer l’absence de hasard dans le choix du lieu de son implantation. En effet, elle fut probablement placée sur cette élévation pour que le pèlerin capte du regard les grands édifices cités plus haut et lui rappellent sa soumission envers la puissante majesté chrétienne moyenâgeuses que ces édifices représentent et dont l’abbaye de Quarante fut l’une de leurs suffragantes. (En fait, de ce lieu, les deux cathédrales se détachent - l’une sur l’horizon, Béziers, -l’autre sur le miroir de l’étang de Bages, Narbonne. L’abbatiale de Quarante, proche, masque une partie de la plaine de l’Aude. (Photos page 61 ). La traverse de "cresse," au premier plan, précède la cathédrale de Béziers qui se détache l’horizon.

Photo J. Coupat

61 La cathédrale de Béziers

La cathédrale de Narbonne

L’abbatiale de Quarante

Ci-dessus, du pied de la croix de Juillet, vue des trois lieux selon le dicton de 1771.

A- Emplacement de la croix de Juillet. Le tertre, sur lequel la stèle fut érigée, il y a fort longtemps, appartenait en 1900 à Mr Henri Rachou. L’une des croix de cette stèle fut retrouvée brisée à terre, reliquat d’une période mouvementée (Guerre de religion, révolution, événement du 19ème siècle). Oubliée, la stèle sans croix fut sortie des décombres par les paroissiens de Quarante et leur curé Vabre en 1919, à la suite d’une procession pour conjurer une longue période de sécheresse. La croix cassée en pierre, qui jadis surmontait la stèle, sera plus tard, sortie des mêmes décombres par un membre de la famille Fabréguette, propriétaire de la vigne voisine de cette stèle. Le curé Vabre raconte dans ses notes:

"En l’an de grâce dix neuf cent dix neuf, une sécheresse considérable ayant détruit une grosse partie de la récolte, quelques Paroissiens sont venus me supplier de demander la pluie, en faisant revivre la tradition d’aller en pèlerinage, prier à la croix de Juillet. Le troisième dimanche d'août après midi, le public convoqué vint en grand nombre prier autour de la croix. Le mardi suivant, le vent du nord, qui séchait les plantes, fut arrêté et remplacé par le vent du midi. En reconnaissance, j’invitais les Paroissiens à m’aider à faire sortir la croix des décombres, car abandonnée depuis fort longtemps, il n’y avait à cet endroit que des dépôts de pierres. Une quête me permit de commander un croisillon de 0,70m de haut, au forgeron Alphonse Boissezon, et Mr Guisset, maître maçon, fut chargé d’élever le piédestal. Auparavant j’avais fait promettre à Henri Rachou de « basboi ?», propriétaire de l’herme sur lequel est élevée la croix, ni de revendiquer le monument, ni de le détruire.. En foi de quoi. " Louis Vabre , 30 novembre 1919 .

62 Peu d’années après, en Juillet 1944, le curé Valette (1943-1970) célébra une messe à cette même croix et " au dire des participants, il plut le jour même. " Ces textes nous renseignent sur cette stèle et semblent indiquer qu’elle ne fut pas aussi souvent fréquentée que le laissèrent entendre les Quarantais, si ce n’est que sporadiquement par superstition ou croyance liée à des désordres climatiques au dix-neuf et vingtième siècle. Supposé restée dans l’oubli de nombreuses années avant le 1900eS, tombée en ruine probablement depuis qu’elle fut décapitée de la "rose-croix "jetée à terre, relevée en 1919, elle n’a pas reçu d’inscriptions supplémentaires depuis. Par conséquent, dans les derniers siècles, ce lieu n’aurait pas eut la fréquentation intensive qu’il reçut des pèlerins du Moyen Age qui laissèrent de nombreuses marques de leur croyance gravées sur la stèle. Ce manque, pourrait s’expliquer par les décrets révolutionnaires du 21 Février 1795 interdisant les cérémonies de tout culte hors enceinte choisie pour les exercer (Art. I à XIII ), malgré la chartre d’assouplissement du 7 août 1850. Cependant, il n’en a pas toujours été ainsi en d’autres lieux de la commune. En effet, on constate que des autorisations d’élever des calvaires ont dû être données, entre 1790 et 1900, (voir les croix et leur date), consécutives à des marches missionnaires. Par contre, il y eut des refus, comme celui notifié au curé Louis Vabre, le 23 mai 1904, par un courrier émanent de Mr Paulet Jean, Maire de la commune. Celui-là même qui, au mois de février 1903, faisait déposer le crucifix du milieu de la place de l’Abbadié en refusant de le replacer ailleurs. Ainsi, le curé L. Vabre écrit dans le cahier paroissial de 1903 : "Ce jourd’ hui vingt et huit mai, et an que dessus, nous avons reçu la notification suivante : -Le maire de la commune de Quarante Hérault. -Vu la loi des 16 et 24 Août 1790 titre XI -Vu la loi du 13 Juillet 1837. -Vu la loi du 5 Avril 1884 ...etc...etc. - Vu le vœu du conseil municipal en date du 21 mai courant. Arrêté: -Art. I . Toute cérémonie extérieure, toute manifestation publique, toute exhibition d’emblème et tout rassemblement de nature à entraver la libre circulation sur le chemin et dans les rues, sont expressément interdits dans toute l’étendue de la commune. -Art. II . Toutes contraventions, au présent arrêté, seront constatées par des procès verbaux et poursuivis conformément aux lois. Quarante le 23 mai 1904. Le Maire :Paulet Jean. -Vu pour accusé de réception: Le /Préfet. Béziers le 20 mai 1904 Signé : Gélinet. " "Nous avons lu le présent arrêté le 29 mai Dimanche de la trinité, aux deux messes, avec la protestation dictée par notre conscience."

b- Ses appellations. Le nom le plus fréquemment utilisé est " Croix de Juillet ". Il tirerait son origine probable contemporaine, des processions religieuses qui s’y déroulèrent à la demande des fidèles. Elles s’organisèrent auprès du prêtre de la paroisse et au pied de cette croix. Dans leurs incantations, les personnes vinrent implorer

63 particulièrement à partir du mois de Juillet. Est-ce une des raisons pour laquelle ce lieu et stèle porteraient ce nom? Cette croix est aussi désignée sous l’appellation " Croix de Juliette " sur la carte I.G.N.2545-0.notamment. Il est supposé venir d’une certaine Juliette D’Ouveillan. Selon notre point de vue, il ne peut être retenu l’hypothèse que son nom " Juillet " soit lié à celui de " Ste Juliette " des environs du village d’Ouveillan distant de huit kilomètres. Dans de tels rapprochements, il faudrait alors donner comme origine aux lieux, saints ou pas, de notre village, ceux des Sts des villages voisins portant les mêmes patronymes. Nous verrions alors se confondre les Saints de Quarante avec ceux pris pour référence dans les communes limitrophes, comme : St Michel de Quarante, avec St Michel de Bize, St-Jean de Conques avec celui d’Ouveillan, St Frichoux avec celui de Capestang…etc.

c- Situation géographique de cette croix. Plantée dans le sol comme dans le temps, dressée entre terre et ciel, baignée de lumière, cette stèle repose sur le versant oriental du plateau des Fargoussières. C’est une des plus hautes terrasses quarantaises, à la naissance de " la traverse de Cresse " orientée à l’est en territoire de Creissan. A deux cent mètres du niveau de la mer, le regard plonge et se perd dans une plaine entrecoupée de vallons sur 120°, de Béziers aux confins des Pyrénées andorranes que la courte période hivernale laisse juste le temps de se napper d’un manteau blanc que les premiers rayons printaniers font disparaître. Elles nous invitent parfois à les saisir tellement elles nous paraissent proches dans l’azur sans voile. Au pied de la croix, le grand vallon "traverse de cresse",dirige le regard, du pèlerin ou voyageur, sur la cathédrale de Béziers, la survole et emporte leur imaginaire vers la Rome Antique, comme par le lointain passé. (Voir page 55)

d -Les ex-voto -Leurs aspects - Ce qu’ils semblent représenter. On ne dénombre pas moins de cinquante cinq ex-voto lisibles gravés sur l’ensemble de la mâture (colonne et piédestal) de cette stèle. Il semble qu’ils furent gravés en deux groupes ou périodes différents. 1-Les ex-voto gravés sur la colonne. sont en majorité perçus comme des croix " orant " qui, selon la définition, sont des croix de chrétiens, en principe primitifs, représentant des personnages dans l’attitude de la prière: bras écartés et mains levées, faisant penser à une réminiscence des croix nordiques, de l’époque des " Runes Celtiques " avec la croix Algiz ci-contre. Pour autant, elles ne peuvent pas être antérieurs au VIè S, époque de la christianisation des celtes. .Elles feraient dater ces "ex-voto quarantais" d’une période comprise entre le VIè au XIIIè Siècle incluant la christianisation de notre province, le début du catharisme (1), celui des pèlerinages de St Jacques de Compostelle et la période des chevaliers de St-Jean et Hospitaliers-de-Jérusalem, soldats du Christ. (1) A Quarante, on peut douter d’un rapprochement avec les Cathares, puisque ce bourg, d’après les textes qui nous sont parvenus, n’a pas été inquiété par le catharisme. Au contraire, d’après le concile de Béziers, de 1255, "l’abbé Bérard du monastère de Quarante, fut prié d’aller combattre au près du sénéchal de Carcassonne pour s’emparer du château de Quéribus que défendait l’évêque hérétique Chabert de Barbaira et sa troupe." Il faudrait donc s’étonner d’avoir sur le sol quarantais de cet abbé, la présence d’une stèle aux symboles Cathares.

64 2– Les ex-voto gravés sur le piédestal. Ils sont majoritairement gravés sous la forme de croix latines et pattées semblables à celles des chevaliers et hospitaliers de St-Jean-de-Jérusalem. Or, en contrebas, à cinq cent mètres au sud-ouest en direction du village de Quarante, se trouvent les ruines d’une ferme fortifiée, "les Uyères." Elle appartenait au chapitre de l’abbaye et aurait été habitée par des fermiers de l’ordre des hospitaliers de St-Jean, comme pouvaient l’avoir été la ferme du Rougieras, le pigeonnier, la ferme de Couqette, la grange haute, la grange basse et l’hôpital de St- Jean de Rouière sous la tutelle de la commanderie de St -Gilles-du-Gard (Voir l’acte d’échange de 1262). Les chevaliers du territoire quarantais, en particulier ceux des Uyères, ajouté des autres passants de la voie pérégrine et commerciale (Capestang-Cahors), proches de cette stèle, auraient pu faire naître une dévotion particulière à cette croix. Ainsi, dans l’intimité et l’isolement, les fidèles qui s’y recueillirent, purent élever leurs prières et graver sur ce livre de pierre, leur symbole religieux .

e- Diversité des ex-voto de la croix de Juillet. La diversité de style en fait des ex-voto individuellement gravés par des pèlerins, des voyageurs, des chevaliers ou tout autre individu de passage. Faut-il voir en ce lieu, un ancien passage, endroit symbolique ou mystique disparu, qui aurait traversé les âges gravé dans la pierre comme dans la mémoire populaire locale; celui d’un sanctuaire, oratoire antique, église ou cimetière disparu, etc., duquel il ne resterait que la stèle et ses ex-voto d’un autre temps. On a constaté sur la colonne une ’érosion des croix de style " Orant "plus avancée que celle des croix latines ou pattées du piédestal, pour une roche de même nature. En admettant que ces symboles érodés fussent gravés à deux périodes différentes, (les "Orant" Celtiques et les "pattées" de l’ordres des chevaliers), il est opportun de citer cette phrase de César lorsqu’il disait : " qu’ il n’y a que deux ordres qui comptent dans la Gaule, les Druides et les chevaliers," ce qui corrobore, par hasard, la diversité des croix ex-voto de cette stèle. N’y a t-il pas, sur celle-ci, des croix susceptibles d’être, soit celtiques et " Orant ", soit de la chevalerie et " Pattées "? Par ailleurs, pour expliquer la présence de ces ex-voto, on serait tenté de se servir de témoignages verbaux ou écrits, mais seulement deux nous sont parvenus : l’un par Louis Vabre en 1919 , l’autre, par Valette en 1944, tous deux curés de la paroisse. Compte tenu de l’absence de preuve et de l'apparence moyenâgeuse dont font état ces marques, il est difficile d’admettre l’hypothèse qu’ elles soient contemporaines. On constate par la diversité de leurs formes que ces ex-voto ont été individuellement gravés et ciblent plutôt une période médiévale.

f- Datation de cette stèle. On a précisé que la colonne et son piédestal auraient été récupérés d’une villa romaine. Ils ont pu l’être pour un culte, même païen, à l’époque ou les religions romaines de notre province se superposaient encore au christianisme.

65 Or, on pressent un culte romain en ce lieu, par la présence de la colonne romaine ou gallo-romaine. Cette dernière, par la suite, aurait pu servir au culte chrétien et de support aux croix chrétiennes. Pour dater ces dernières, on retiendra plus particulièrement celles dont la forme se rapproche des croix pattées et Orant dont on pense que toutes deux sont de la main des chevaliers hospitaliers du XIIè S.

Ex-voto Orant de la stèle dite de " Juillet."

Analogie des croix ex-voto de "Juillet "avec d’autres croix ex-voto. Il ne fait aucun doute, que les croix gravées sur la stèle dite de "Juillet " représentent, dans la majeur partie des cas, des croix pattées, symbole combien prestigieux, de l‘époque d’une certaine Chevalerie au service de la chrétienté: les chevaliers de SaintJean-de-Jérusalem et les Hospitaliers. Or, pour étayer nos recherches, on s’est rendu dans l’un des lieux d’embarquement de ces chevaliers du Christ enrôlés pour l’orient, le port d’Aigues-Mortes. C’est là, dans la salle basse de la tour de Constance pénétrée d’une lumière diffuse et d’une atmosphère glaciale, que les chevaliers soldats du Christ se regroupaient avant leur périple oriental. On imagine qu’ils s’agglutinaient autour de la seule cheminée dont l’âtre, garni de bûches incandescentes, diffusait sa chaleur. A tour de rôle ils venaient en prendre un dernier souffle à l’écoute de récits aventuriers de compagnons d’arme. Dans une ambiance de paroles dialectales confuses, de chaleur humaine et de foi, certains griffèrent la roche tendre, de l'appareil calcaire de la cheminée, d’une ultime et discrète croix témoin et symbole de leur croyance, qu’accompagnèrent une prière et un signe de croix à ne pas en douter. Ils ne pensèrent pas que ce livre de pierre livrerait un jour une page de leur histoire. En s’identifiant aux croix d’Aigues-Mortes, les croix de la stèle dite de Juillet à Quarante ont aujourd’hui un âge, une origine, une autre image que celle que nous leur connaissions. Cette stèle aux ex-voto est le symbole d’une époque révolue à la croyance "aveugle" qui n’a plus d’égale dans la chrétienté d‘aujourd'hui. On peut comprendre l’impact qu’eut celle-ci sur la population et ses traditions locales religieuses d’antan. C’est pourquoi on peut admettre, que de cette pierre ‘’sacrée de Juillet’’ élevée à toucher parfois le ciel, le chrétien qui s’y recueillait l’oblitéra d’ex-voto "Orant " dont il reproduisait l’attitude dans sa prière, en exprimant par cette posture, le sentiment de s’élever vers le Divin. Ci-contre, la cheminée de la tour de Constance sur laquelle sont gravées les croix, en particulier "Orant", que l’on retrouve sur la stèle de Quarante. Certaines, en forme de voile où d’ancre de navire conjuguent la double vision de la croix et du périple maritime.

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h- Tableau de comparaison des croix d’ Aigues-Mortes avec celles de la croix de Juillet de Quarante et d’autres lieux à la page suivante.

67 Graffitis templiers de la porte des tours à Domme- (Dordogne)

Eglise conventuelle St Antoine Commanderie de Pondaurat Propriété de l’ordre de Malte.

Croix locale dans le musée de Cruzy.

Pilier et mur gauche du Saint Sépulcre. On retrouve ci-dessous la croix sur un pied triangulaire Croix trinitaire.

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Stèle de la croix dite " de Juillet ."

Photo J. Coupat

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8- Cette stèle, aux ex-voto, marquerait-elle l’emplacement d’une bataille ? Il est connu, qu’à cette époque moyenâgeuse, l’Eglise recherchait des inventions (1) pour en doter ses sanctuaires ou en faire naître d’autres. Si les habitants du bourg de Quadraginta avaient livré bataille en ce lieu de " Juillet ", il est très probable que les autorités religieuses locales de l’époque se seraient chargées d’élever un sanctuaire à cet endroit, aux noms de ceux qui, au prix de leur sang, auraient témoigné pour le Christ. Or, il n’a jamais été, ni remarqué de traces d’un quelconque bâtiment ou oratoire, ni relevée la présence de documents archivés concernant un tel événement guerrier. Par conséquent, cela porte à croire qu’il n’y a jamais eu de conflit, dans son proche environnement, au moins depuis la présence des chanoines sur le sol quarantais, eux qui par principe rapportaient tout par écrit. Pouvait-il être l’emplacement d’un FANUM, lieu consacré, temple romain, exorcisé par la suite ?, avance l’abbé Giry.. (1)

Qu’est-ce que l’Invention de l’église ?

" C’est à l’origine un culte populaire qui correspond au besoin de voir, de toucher mais aussi, un besoin de magie et de surnaturel, c’est celui des reliques. Il naît au deuxième siècle. Au IVè.S, la croyance s’étend dans les vertus surnaturelles des reliques jusqu’au VIIe..S. Le transfert des corps est interdit par le droit Romain, mais dès le VI è S., il se pratique déjà le transfert des reliques quand il s’agit de donner une plus digne sépulture à un Saint. A partir du VIIè.S, les exceptions au droit romain relatif aux corps Saints et en particulier, le désir d’assurer aux reliques les honneurs qui leur sont dus, favorisent les fragmentations et donc la mise à l’honneur de reliques corporelles. Il en découlera, au fil du temps, les fausses reliques qui se multiplieront. Les lieux de culte chrétien quelquefois à plusieurs fonctions, sont, comme les églises courantes des bourgs ou celles des monastères (abbatiales), consacrées et parfois dédicacées au nom d’un apôtre, d’un Saint, d’un martyr. Alors depuis le III e.S., l’autel est situé sur le tombeau même où est célébrée l’eucharistie. Il découlera de ce culte la construction d’édifices sur le tombeau de ces reliques ." Il est fait mention dans un article de l’abbatiale de Quarante, que son autel était posé sur un sarcophage en appui sur deux autres se trouvant derrière. L’Eglise, sans autoriser la pratique du culte des reliques, ne l’a jamais interdite, "les monastères l’ont même encouragée, c’est pour eux une source financière qui motivera la rédaction de livres des miracles en guise de publicité," écrit Françoise Le Bas, dans CASA info n°4 de Février 1986. La bulle du pape Innocent VI révèle le, 16 Mai 1357, en parlant de l’église du bourg : "que dans l’abbatiale de Quarante reposent quarante Martyrs, outre de nombreux corps d’autres Saints y reposent,... qu’il y a des reliques de la bienheureuse Vierge elle-même, du bois de la vraie croix de N-S. et de plusieurs autres saints ," ce qui prouve que ce bourg fut largement concerné par cette mode à fort encouragement financier. Par contre, et là il ne s'agit pas de reliques mais d’ex-voto, il n’est pas exclu que ces symboles religieux de la croix de Juillet furent gravés durant la grande période pérégrine XII et XIIIè.S. Il fut remarqué en effet le tracé d’un chemin, soit disant de grand passage, proche et en contrebas de cette croix. Sa proximité et fréquentation auraient pu favoriser la construction d’un oratoire sur ce tertre, destiné aux pèlerins, voyageurs, chevaliers, repentis, en quête de prières, les invitant à mettre le genoux à terre et s’y recueillir.

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9- Les croix en tête de fût de la stèle dite de " Juillet. " A notre connaissance, il y eut au moins trois croix dressées au sommet de cette colonne romaine ou gallo-romaine. Aujourd’hui, on est certain d’en connaître deux. Une latine dressée en 1919 et une autre antérieure en pierre et Rose-Croix. a)- L’ actuelle croix cruciforme. L’actuelle croix en acier, a été forgée par Alphonse Boissezon, forgeron à Quarante, et placée par maître maçon Guisset en 1919 sur la demande du curé de la paroisse de l’époque, Louis Vabre. On a expliqué, page 60, les circonstances dans lesquelles elle fut relevée. b)- L’autre croix la Rose-Croix . Antérieurement à 1919, cette croix, en pierre rougeâtre, probablement sculptée à partir d’un bloc calcaire local, coloré d’oxyde de fer équipait la colonne. Retrouvée cassée parmi l’amas de pierres du talus de la vigne jouxtant la croix, elle est conservée par Mr Fabregettes propriétaire du talus . Cassée lors de sa projection au sol, c’est le plus gros et intéressant morceau qui, retrouvé, présente deux branches sur quatre permettant d’apprécier la délicate beauté de cette surprenante croix.

Surprenante à bien des égards. Surprenante parce qu'elle est "rose-croix occitane" aux deux faces sculptées, l’une concave et l’autre convexe, au centre desquelles apparaissent des roses-rosace. Malheureusement, le vandale qui la déchaussa de la colonne en la projetant à terre, n’a satisfait que sa haine, sans penser à l’œuvre et à son décor, symbolique représentation de la vierge ou du christ.

Quel lien établir entre ce symbole occitan, la rose-croix et les ex-voto "de la croix de Juillet" Y-aurait-il eut un lien avec la chevalerie locale tardive? On rappelle qu‘en terme de chevalerie "Raymond (1)VI de Toulouse" était Chevalier Hospitalier. Certains le considéraient comme un protecteur de la "voie " de la tradition occidentale tout simplement personnifiée par la " voie " alors émergente: " la voie cathare ." " Pour les chercheurs mystiques, la croix est le symbole de l’homme charnel, de son corps physique. Quant à la rose-croix et la rose-rosace représentée au centre d’une telle croix, comme celle de "Juillet," elle symbolise l’âme incarnée dans le corps physique " écrit Bertran de La Farge et de poursuivre" c’est par son ancêtre" Raimond IV de Saint Gilles" que va s’asseoir véritablement la puissance de la dynastie des comtes de Toulouse. Il a affiché son nom : celui de la cité de St. Gilles qu’il fortifie et transforme en base de départ et d’intendance, d’expéditions marchandes, corsaires ou guerrières. Il devient Raimond (1)de St. Gilles et premier des comtes de Toulouse à porter ce titre provençal. " Il laisse la devise " Par ce signe tu vaincras " que nous retrouvons gravée sur le piédestal de la croix des Pradels (n°2) et celui de la croix Laforgue (n°25) de la bourgeoisie Qurantaise du 19ème S. (1) On trouve parfois ce nom écrit sous deux orthographes différentes.

71 Avant de partir à Jérusalem avec son armée pour libérer le St-Sépulcre en 1096, il fait battre monnaie qu’il arbore de la phrase " qui par ce signe a vaincu " sur laquelle figurent le Christ et la croix pattée, en mémoire de Constantin 1er. C’est de cette croix pattée que découleront les croix des Templiers puis occitanes à douze boules et toutes ses variantes. (En page 16 de cette recherche, on trouve les correspondances des croix entre-elles.) Une rosace centrale à six pétales représente Marie, c’est-à dire l’ Eglise. Il s’établit alors un lien entre la croix occitane, symbole des " Comtes Raimond de Toulouse " avec la chevalerie hospitalière d’une part et la rose-croix symbole chrétien d’autre part. (Fig. 3 p.72) Par la présence à Quarante de la rose-croix, celle du nom des lieux de St-Jean, de la croix Pattée, de l’effigie du Précurseur et son symbole baptismale, (les coquilles) en l’abbatiale, ces symboles honorent son territoire. Ils sont les marques de reconnaissance des Hospitaliers envers leurs propriétés. Nul ne peut douter de leurs nombres et lieux sur ce territoire, à l’exemple de St-Jean de Conques, St-Jean de Rouière, Couquette (croix), Grange haute (coquilles), l’Abbatiale (son autel, ses coquilles et son buste reliquaire), la chapelle ruinée de St-Jean à St Privat, la chapelle ruinée de St Jean de Paracolh (pour ses foires et ses processions de St- Jean) et pour finir, la croix de Juillet (par ses croix pattées gravés ). On notera qu’il y a eu à Narbonne, en 1252, un certain chevalier Raymond de Quarante, consul. (Arh. De Narbonne AA. Pag.100 du 19 déc. 1252 ).Il fut précédé par un Bernard de Quarante scribe dans acte de donation en 1188.(cartulaire de Fontcaude.) Puis avant, le 4 oct.1163, un acte rapporte qu' Ermangarde, Vicomtesse de Narbonne, confirme l’abbaye de Quarante dans la possession de la moitié du château de " Colmérac " en présence d’Arnaud de Montescot, maître de la milice,( autrement dit de l’ordre des Templiers, maître des Hospitaliers-de-Jérusalem), il est précisé en outre, qu’ on conviendra que ce dernier était Grand Maître de l’ordre de St-Jean." Présent également, Gausselin d’Azillan maître des Hospitaliers-de-Jérusalem avec Gilbert Assalit." Ce texte confirme la présence de la chevalerie, même dans la signature d’actes en rapport avec l’abbé et les chanoines de l’abbatiale de Quarante.(H.G.L. Tome II- Note L.V. p.644 et suite puis tome IV. P.234 et suite). On remarque la même chose dans l’acte d’échange de Rouèire en 1262.

Fig.1

Fig.2

72 " Il paraît sans doute surprenant de parler de rose-croix car, rares sont celles qui se présentent à nos yeux, au détour d’une rue, sur une façade, sur un fût, sur une placette ou toute autre part. Pourtant, elles existent visibles au hasard de quelques promenades en Occitanie, dans le Larzac ou dans les hautes Corbières. Ces promenades révèleront, sans laisser la moindre place à des interprétations fantaisistes, plusieurs rose-croix dont les plus récentes datent du XIXe S. Dessinées en courbes identiques, certaines figurent en leur centre, une rose indiscutable, alors que d’autres contiennent des éléments décoratifs (fig. 3 p. 73). Pour se convaincre que quelque chose existe véritablement derrière cette tradition de dessin en rose-croix, remontons encore plus loin dans le temps, vers l’une des origines chrétiennes de la croix Occitane: Le dessin des croix de chrétiens nestoriens vers l’an 600 en Irak, ou à Mossoul et en Chine, est indubitablement une rose-croix tracée avec courbes et rosaces " écrit Mr de La Farge." ( Fig.1 page 71 ) Nous disions qu’il n’était pas fréquent d’en trouver et pourtant, nous en possédons une en territoire Quarantais. Elle a "fleuri" jadis, le fût de la croix de " Juillet." Le propriétaire de la parcelle voisine l’a retrouvé cassée non loin de son emplacement d’origine. (photos ci-dessous).

Face concave

Face convexe

" Signalons toutefois que le terme de " rose-croix " (la) a donné son nom à une confrérie mystique qui se constitua en Allemagne au début du XVIIème S. et dont la philosophie occulte synthétise le christianisme et des doctrines théosophiques et alchimiques. Des confréries analogues furent crées en Grande-Bretagne, en France, aux Pays-Bas, etc., à la fin du XXème S. Certaines sont encore très actives. Ses adeptes sont appelés " Rosicruciens ou Rosicruciennes : un rose-croix. C’est également le nom de membre de la " Rose-Croix. " Dans la franc-maçonnerie c’est le titre du titulaire d’un grade supérieur à celui de maître." (Définition du dictionnaire Hachette encyclopédique, collection 10. Ed. 010.).

73 . D’autres textes expliquent que les origines de la rose-croix remonteraient à la plus haute antiquité Egyptienne. Parente de la franc-maçonnerie mais plus ancienne, elle serait un mouvement fraternel et philosophique non religieux. Le nom " rose-croix " est aussi donné aux membres de la confrérie d’illuminés de la " rose-croix." Leur doctrine était inspirée par la magie et la franc-maçonnerie. (Dictionnaire Larousse 1979 Imprimé le 6-2-1980). Nous pourrions nous demander pour qu'elle raison cette stèle était pourvue d’une " rose-croix " ? Des textes avancent que les "rose-croix" apparaissent dans la littérature "ésotérisante" souvent comme successeurs des chevaliers du "Graal" et des templiers " et que la rose-croix est un ordre légendaire " hermétiste " chrétien. En proviendrait-elle ? Fig.3

11- Quels sont ces hommes à l’origine des croix gravées sur cette stèle? On a remarqué que la plupart des symboles gravés, érodés et blanchis par le temps, étaient ou se rapprochaient de la croix pattée, symbole des soldats du Christ ou moines soldats partis guerroyer en Terre -Sainte, contre les infidèles. Leur présence sur notre territoire ne fait aucun doute, leur propriétés locales font foi. Il est donc probable que ces soldats, convaincus de la nécessité d’assister leurs princes dans leurs combats contre les impies, furent enrôlés dans leurs armées. N’oublions pas que leur archevêque, Morin de Narbonne, fut l’un des derniers compagnons de SaintLouis quand celui-ci pris la mer le 12 Février 1271.(Archives de Narbonne AA 107-7eme Thalamus f ° 40)

Ainsi, ces valeureux soldats, avant de quitter leurs terres, seraient venus prier une dernière fois au pied de cette croix " de Juillet " comme un " adieu au pays " qu’ils allaient devoir quitter sans espoir de retour pour certains, comme l’ont fait ceux de la tour de Constance à Aigues-Mortes. Ils auraient pu graver, sur ce livre de pierre, le symbole de leur foi. Le genoux à terre, les bras levés, implorant la bonté céleste de les aider à combattre l’infidèle et à les faire revenir au pays sains et saufs. On imagine qu’après une dernière prière, saignant la roche tendre de la pointe de leur dague, gravant le symbole de leur ordre et croyance, " la croix Pattée des Chevaliers hospitaliers ou Orant ou Latine ", ils s’en sont allés heureux, après que d’autres chrétiens parmi les chrétiens, sortant de leur monastère, se soient unis à eux dans la prière et la gravure. Union d’amour dans la Foi. Mais voilà que ces soldats du Christ de retour de Terre-Sainte en agonie, après avoir subi moult humiliations, souffrances et parfois mutilation, sont pourchassés par les milices du roi Philippe le Bel, en difficulté financière. Le 3 avril 1312, ce dernier supprima l’ordre des chevaliers du Temple pour leurs biens convoités, malgré l’hésitation du Pape Clément V et les largesses de la papauté en général accordées à l’ordre depuis 1139. Arès avoir risqué leur vie en Terre-Sainte pour la cause chrétienne et ses rois, nombreux croisés périrent, sur le bûcher de leur terre natale, par les serviteurs même de cette cause, alors que d’autres plus chanceux, échappèrent à la condamnation suprême, pour avoir en partie été recueillis par l’ordre des Hospitaliers de Malte.

74 .12- Analyse sur cette croix dite " de Juillet ." . Désormais, il semble possible de conclure sur ce qu'a pu représenter, depuis siècles, la Croix de Juillet et ses ex-voto. Les divers paramètres, élaborés dans cette analyse, font apparaître que : 1. la colonne romaine ou gallo-romaine trouva sa place en ce lieu, très probablement au début du Moyen-âge vers le VIème S, 2. les croix ou signes "ex-voto," dont on a parlé, ne peuvent pas être antérieurs au VIè S. et postérieurs au XIIIème S, au moins pour la grande majorité d’entre eux. 3. la similitude établie, par comparaison avec les ex-voto d’Aigues-Mortes, Domme, Saint Sépulcre, confortent le raisonnement de dater les nôtres de la période des croisades, puisqu’on y retrouve des croix ex-voto d’un style particulier aux chevaliers de St-Jean, la croix Pattée entre autres, 4. le territoire de Quarante était occupé par les chevaliers de St-Jean-Hospitaliers dotés de leurs biens, culte et buste reliquaire de St-Jean-Baptiste en l’abbatiale, (confrérie), 5. les croix ex-voto ne sont pas la conséquence d’un lieu de conflit duquel seraient issus des martyrs symbolisés par ces ex-voto, 6. les croix ex-voto sont le fait de gravures individuelles de styles différents, 7.des tractations sont signées, en présence de maîtres de la milice et des Hospitaliers, pour des biens appartenant à l’abbé et ses chanoines. On pense, qu’en comparant le graphisme des ex-voto de Quarante avec ceux gravés par des moines soldats ou des chevaliers soldats du Christ, de la tour de Constance ou d’autres lieux, (voir page 66,67) on admet une similitude de graphisme des uns par rapport aux autres. Par estimation on peut en déduire, leurs dates et origines symboliques, en admettant que ces ex-voto soient liés à l’ordre des Chevaliers Hospitaliers et de St-Jean-de-Jérusalem . En effet, l’armée de croisés de Louis IX était composée de gens de toute origine, géographique, linguistique, sociale. Comment ces gens pouvaient-ils mieux se comprendre, que par la représentation graphique et symbolique de leur vie et croyance qu’ils imprimèrent dans le corps minéral des couvents églises, châteaux, initiés par les maîtres sculpteurs de l’école des premiers architectes romans de leur époque. On sait également, d’après les textes, que l’archevêque Maurin, primate de Narbonne et compagnon de croisade de St Louis, aurait pu enrôler sous ses ordres, des habitants et Chevaliers du lieu de Quarante, pour constituer son armée . Nota. Le manque d’archives locales brûlées à la révolution, (mille deux cent parchemins), ne permet pas de réponses précises pour justifier certains faits ou observations constatés. Certains verrons peut-être là de la fabulation dans certaines réflexions avancées, mais ce n’est qu’un essai. Ils sont alors invités à prendre leur "crayon" de pèlerin et à parcourir le chemin de l’histoire combien riche et prenante de notre belle province de l’Occitanie. Ainsi pourront-ils combler les imperfections de cette reflection.

75

Conclusion. L’essai, élaboré sur les croix du territoire de QUARANTE, permet de mieux connaître, leur étymologie, leur histoire et les lieux dans lesquels elles ont été érigées. Les histoires qui leurs sont propres, sont parfois ponctuées de suppositions ou de questions. L’absence de parchemins détruits ou jalousement gardés par des familles, ne permet pas de réponses justifiées aux questions posées qui sont la conséquence d’un manque d’informations dans la rédaction de cet essai. Elles ne manqueront pas d’interpeller le lecteur et de provoquer chez lui des critiques qui ne pourront être bénéfiques que s’il apporte un complément d’information par des documents ou ses connaissances. Le but de cette composition est de porter à la connaissance du lecteur, l’histoire des croix de notre village . En outre, cette recherche met l’accent sur un paysage chrétien de longue date, soumis aux exigences des lois, qui obligeaient de célébrer le culte dans le lieu qui lui était destiné, en application des décrets découlant de la grande Révolution et explicitement renouvelés en 1904 à Quarante notamment. Néanmoins, beaucoup de ces modestes croix ont fleuri, par leur silhouette, le paysage communal Quarantais, alors qu’en un temps plus reculé, sculptées ou gravées dans la pierre, d’autres croix ont fait l’histoire religieuse de ce village. On notera que, par un pur hasard, le nombre Quarante et ses unîtes identifient, non seulement, les quarante six croix, les quarante cinq villas romaines dénombrées du territoire communal, mais aussi la rivière du lieu la Quarante (en réalité la Roquefourcade ) et le patronyme du village sous l ’orthographe de QUARANTE ( Quadragenta). Les quarante six croix du territoire de Quarante se décompose en: - deux inconnues ou incertaines et pourtant citées en archives. - quarante et une postérieures au XVIème S, - trois antérieures au XVIème S, dont deux sont de la consécration de l’abbatiale, - vingt quatre portent une date. Dans cette recherche, une croix fut particulièrement intéressante à étudier : la croix aux ex-voto dite de "Juillet ". A noter,d’après l’étude, que cette croix de Juillet fait prendre conscience de l’impact qu’eut l’ordre monastique St Augustin, lié à celui des hospitaliers, à St-Jean-Baptiste et à toute la communauté du bourg de Quarante. L’étude des croix a permis d’arpenter le territoire de Quarante et d’en mesurer l’aspect, historique, géologique, géographique, floral et animal et de tisser un réseau d’éventuels chemins pour randonnées. Ce travail a été mené sur le terrain comme dans les archives, par Jacques COUPAT . Il adresse ses plus vives remerciements tout particulièrement aux dévoués collaborateurs, Mr François Bottin et à Mme Jeanette Phillips, puis aux prêtres de cette paroisse, au personnel administratif de la mairie de Quarante, des médiathèques de Béziers et de Narbonne, à celui de la V.N.F. de Toulouse, des divers musées, pour leurs archives mises à sa disposition, ainsi qu’ à tous ceux qui, par le biais de leurs écrits, lui ont permis la rédaction ce modeste essai. A la communauté de Quarante . Jacques COUPAT 10-01-2012

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